Réduire le coût du lancement produit : le pari gagnant de l’IA
Le coût du lancement produit est devenu la première préoccupation des industriels dans le monde, d’après le dernier rapport d’Hexagon et Forrester Consulting. En misant sur l’IA, la simulation et une approche shift left, ils peuvent transformer ce défi en avantage compétitif.
Dans l’industrie, chaque nouveau produit est un pari. Entre l’idée et la mise sur le marché, le processus s’avère coûteux, long et semé d’aléas. L’enquête 2025 d’Hexagon et de Forrester Consulting, menée auprès de plus de 1 000 industriels des divers secteurs[1], révèle que le coût de lancement, ou New Product Introduction (NPI), est aujourd’hui la préoccupation numéro un des répondants, toutes régions confondues[2].
Et pour cause, entre une évolution rapide des marchés, une concurrence mondiale accrue, une demande croissante en matière de personnalisation, des coûts de développement élevées et des exigences réglementaires, il s’impose comme un processus stratégique incontournable pour garantir la compétitivité, la qualité et la rentabilité des nouveaux produits industriels. Ce n’est donc pas un hasard si, tant aux États-Unis, qu’en Asie et en Europe, il arrive en tête des priorités, devant la logistique ou la disponibilité des matières premières.
Le constat est que près de 39 % des dirigeants interrogés considèrent que le coût du NPI – représentant 10 % à 30 % du coût total du produit dans le secteur de l’aéronautique, voire plus de 40 % pour les dispositifs médicaux ou les semi-conducteurs – constitue l’obstacle majeur à leur compétitivité. Développer un produit suppose des cycles d’itération nombreux, des tests répétés, des erreurs parfois coûteuses et des délais rallongés. Plus d’un industriel sur trois pointe l’allongement du time to market comme conséquence directe de ces frictions. Autrement dit, innover coûte cher et prend trop de temps.
Face à ce défi, les entreprises ne cherchent pas à recruter davantage, mais à accélérer avec les mêmes moyens. Plus de 70 % des décideurs affirment devoir réduire la durée de développement sans augmenter les effectifs. L’équation paraît insoluble. Pourtant, l’étude met en évidence une voie prometteuse : l’exploitation des technologies numériques et de l’intelligence artificielle (IA).
L’IA appliquée à la conception, la modélisation et la prévision permet de détecter les erreurs plus tôt, de simuler les comportements et d’évaluer les performances avant même de fabriquer un prototype. Déjà, 43 % des répondants déclarent avoir réduit le coût du NPI grâce à l’IA et 45 % prévoient d’obtenir ce bénéfice prochainement. L’écart entre les « forts utilisateurs » d’IA et les « faibles utilisateurs » est révélateur : seuls 23 % des premiers citent le manque d’agilité comme un problème, contre 40 % des seconds.
C’est le principe du shift left qui consiste à déplacer les contrôles et validations en amont du cycle de développement. Plus on simule tôt, moins on accumule de retards et de reprises coûteuses. Selon l’enquête, 39 % des industriels estiment que les simulations précoces offrent le meilleur retour sur investissement en matière de qualité. En liant conception, ingénierie et production autour de données fiables, les entreprises réduisent les erreurs tardives, accélèrent la mise sur le marché et préservent leurs marges.
L’enjeu dépasse la simple réduction des coûts. Il s’agit de transformer l’innovation en moteur de compétitivité durable. Alors que les chaînes d’approvisionnement demeurent instables et que les exigences réglementaires se renforcent, la maîtrise du NPI devient un facteur stratégique. Les industriels capables de livrer plus vite, à moindre coût et avec une qualité constante disposeront d’un avantage déterminant.
La bataille de la compétitivité industrielle se joue désormais dans la capacité à anticiper conclut le rapport. L’IA, la simulation et le shift left ne sont pas des gadgets technologiques. Ce sont là les leviers qui permettent une innovation maîtrisée. Réduire le coût du lancement produit n’est pas qu’une exigence financière, c’est la condition pour continuer à innover sans se fragiliser.
[1] 1 051 répondants ; secteurs : aérospatial et défense, santé et sciences de la vie, construction automobile, électronique et énergie.
[2] 20 % Amérique du Nord ; 33 % Europe, Moyen-Orient, Afrique ; 37 % Asie-Pacifique, 10 % Amérique latine