Le bassin industriel d’Alès, une histoire de reconversions

Le bassin industriel d’Alès, une histoire de reconversions

 

Avant-propos

Lancé en novembre 2018 par le Gouvernement et renouvelé en mai 2023, le programme Territoires d’industrie participe à la stratégie de réindustrialisation de la France via la territorialisation des actions en faveur de l’industrie. Cet ouvrage est le fruit d’un questionnement autour des conditions locales qui mènent certains territoires à se distinguer des autres en matière d’emploi industriel, questionnement qui justifie la participation de La Fabrique de l’industrie à la création et à l’animation de l’observatoire des Territoires d’industrie. Il explore ainsi le cas du bassin d’Alès, un des 149 territoires labellisés Territoires d’industrie durant la première phase du programme.

Parler des reconversions du bassin d’Alès, c’est évoquer le temps long et les différentes étapes nécessaires à l’industrie pour se reconstruire. C’est aussi prendre en considération le caractère multidimensionnel de ces processus. En effet, se relever de la fermeture des mines ne signifie pas seulement modifier le paysage industriel ; c’est accompagner la population dans cette transformation, changer l’identité du territoire, adapter l’environnement d’affaires dans son ensemble.

Nous espérons que ce document offrira aux industriels, aux collectivités locales et aux décideurs publics des pistes de réflexion sur la revitalisation des territoires industriels et sur les pratiques locales. Nous recueillerons avec grand intérêt vos retours dans ce domaine.

La collection des « Docs de La Fabrique » rassemble des textes qui n’ont pas été élaborés à la demande ni sous le contrôle de son conseil d’orientation, mais qui apportent des éléments de réflexion stimulants pour le débat et la prospective sur les enjeux de l’industrie.

L’équipe de La Fabrique

Résumé

Ancienne région minière, le bassin d’Alès a dû faire face à la fermeture de ses mines à partir des années 1960. Il n’a dès lors cessé de se renouveler, non pas en effaçant son passé industriel mais en mettant l’industrie au cœur de son projet de territoire. Sa stratégie a en effet consisté à s’appuyer sur son socle de compétences, ainsi que sur les programmes de reconversion, pour mettre en place des activités à même de porter un nouvel élan industriel. Les acteurs locaux ont poursuivi cette dynamique après la fin des programmes de reconversion portés par l’État, et sont parvenus à contenir le mouvement de désindustrialisation. Malgré cela, le territoire se heurte toujours aux défis du chômage et de la pauvreté. Seule, l’industrie ne peut pas apporter « la » solution à tous les enjeux du territoire mais elle en fait partie. Et cela, les acteurs cévenols l’ont bien compris.

Les sites miniers localisés à Alès et à La Grand-Combe constituaient deux sommets d’un triangle qui, avec Bessèges, formait le bassin houiller des Cévennes. Ce dernier a connu son apogée en 1958, année du pic de production de charbon. Après cette date, le tissu industriel correspondant s’est délité et il a fallu réfléchir à la reconversion du territoire. Une première vague s’est déroulée dans les années 1970-1980, autour des grands groupes et de la sous-traitance industrielle, afin de sortir de la mono-spécialisation ; une seconde a eu lieu dans les années 1990 et 2000, autour des PME et du choix de se spécialiser sur un nombre restreint de filières. Les années 2010, marquées par la fermeture de certaines usines qui avaient participé à la première vague, et par l’apparition de nouveaux enjeux en matière foncière, environnementale et de compétences, annoncent la fin de cette seconde vague et l’amorce d’une troisième. Ces phases de reconversion illustrent la capacité de rebond du territoire d’Alès mais aussi la difficulté éprouvée par les acteurs locaux à pérenniser les transformations du tissu industriel qu’ils ont commencées.

Cette difficulté s’explique en partie par le fait que la reconversion industrielle d’un territoire est un processus multidimensionnel. La transformation du tissu économique affecte nécessairement les dimensions économique, sociale, géographique, démographique et politique du territoire. En cela, la reconversion est un phénomène systémique. En l’espèce, la tertiarisation de l’activité économique, la montée du chômage, les migrations des habitants sont autant de processus qui ont accompagné ces vagues de reconversion.

La régénération du tissu industriel ne peut être obtenue par les seuls industriels. La mobilisation d’autres acteurs est nécessaire, à commencer par les acteurs publics nationaux et locaux. Dans le cas des bassins houillers, le programme de reconversion bâti autour de Charbonnages de France et de ses instruments (la Société financière pour favoriser l’industrialisation des régions minières, le Fonds d’industrialisation du bassin alésien) a été déterminant. De cette période qui s’est étalée des années 1960 aux années 2000, il reste un socle d’entreprises mais surtout des acteurs qui ont pris le relais. En effet, les équipes de la municipalité et de l’agglomération d’Alès ont su renouveler les instruments de Charbonnages de France et poursuivre le projet industriel du territoire. Ils font état d’initiatives pertinentes, cohérentes et coordonnées, à l’image de la création du Pôle mécanique sur le site d’une ancienne mine, du concours Alès Audace ou de l’accompagnement offert aux entreprises par l’incubateur de l’Institut Mines-Télécom (IMT) Mines Alès et par l’agence de développement Alès Myriapolis. En particulier, ces collectivités parviennent à se saisir efficacement des nouvelles contractualisations proposées dans le cadre de la politique d’aménagement du territoire et dans le contexte maintenant établi de la décentralisation. Toutes ces initiatives participent activement au bon fonctionnement d’un écosystème industriel, dans lequel les organismes de formation, du Greta-CFA à l’IMT Mines Alès en passant par les lycées professionnels, sont particulièrement bien insérés. En revanche, ces acteurs économiques semblent moins reliés aux territoires voisins, notamment ceux de l’Occitanie, ce qui contribue à renforcer l’impression d’enclavement des acteurs locaux.

Toutefois cette dynamique mise en œuvre par les acteurs locaux en faveur du développement économique laisse de côté une partie de la population. Certes, l’emploi industriel se maintient dans le territoire alors qu’il chute ailleurs en France mais la précarité et dans une moindre mesure le chômage – qui est sur une tendance baissière – semblent aussi y être installés durablement.

Le nouveau projet de territoire met l’accent sur le développement durable. Les élus et industriels affirment qu’ils avaient déjà réfléchi à des actions en ce sens, mais que les conditions n’étaient pas réunies pour transformer l’essai plus tôt. Le territoire peut donc s’appuyer sur un socle d’acteurs déterminés, mais se heurte dans le même temps à un manque de compétences (aussi bien sur le plan de la formation des jeunes que sur celui de leur mobilité) et à une pénurie aiguë de foncier. Surtout, l’enjeu sera d’insérer la population tout entière dans ce projet de territoire.

En conclusion, la perspective historique adoptée dans ce Doc révèle le caractère dynamique du processus de reconstruction d’un territoire et l’horizon de long terme dans lequel se conçoit nécessairement le développement de l’industrie. Elle met également en évidence l’importance, pour ce territoire, de disposer d’un socle d’acteurs, d’activités et de compétences, sur lequel il peut fonder un processus d’adaptation et de transformation. Les territoires n’inventent pas leur industrie, ils la réinventent.

Remerciements

Merci à l’équipe de La Fabrique de l’industrie ainsi qu’à l’ensemble des personnes qui ont contribué à nourrir ce document, notamment celles qui ont répondu favorablement à nos demandes d’entretien : Christophe Abella (UIMM Occitanie), Jalil Benabdillah (région Occitanie), Marc Brachet (Alès Myriapolis), Samuel Corgne (Ergosanté), Julien Cornille (UIMM Gard-Lozère), Annick Le Lan (Alès Agglomération et Alès Myriapolis), Jérémy Marin-Cudraz (Pôle mécanique), Alexia Melloul (Mission locale jeunes Alès-Cévennes), Michel d’Ozenay (Senfas), Jean Rampon (sous-préfet d’Alès), Jonathan Russier (Citynox), Gwenaëlle Thiery (Ergosanté).

Merci également à Thierry Weil, professeur à Mines Paris PSL et aux partenaires de l’observatoire des Territoires d’industrie, l’Agence nationale de la cohésion des territoires, la Banque des Territoires, l’Institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts, Intercommunalités de France, Régions de France.

Une délégation de l’observatoire des Territoires d’industrie et l’équipe de La Fabrique de l’industrie ont eu l’opportunité de se rendre sur place le 30 novembre et le 1er décembre 2022. Un grand merci aux entreprises qui nous ont ouvert leurs portes (Ergosanté, Les poteries de la Madeleine, Senfas et Citynox), ainsi qu’à Annick Le Lan et à Marc Brachet, d’Alès Myriapolis, pour l’organisation de ce séjour.

Ce document a également bénéficié des interventions du séminaire de l’observatoire des Territoires d’industrie du 1er décembre 2022 : Aziz Aït Amer (fondateur de SDTech), Frédéric Burgals (directeur d’usine chez Dexel-Groupe Sika), Alexandre Coulet (gérant de S Group, référent du programme Territoires d’industrie et président de Leader Alès), Louis Gallois (coprésident de La Fabrique de l’industrie), Aurélie Genolher (conseillère régionale d’Occitanie et vice-présidente d’Alès Agglomération), Anne Lichtenberger (adjointe à la directrice du développement économique et en charge de l’entrepreneuriat de l’IMT Mines Alès), Gérald Mirabel (directeur d’usine de NTN-SNR Cévennes), Christophe Rivenq (président d’Alès Agglomération et d’Alès Myriapolis), Maud Sébastien Saint-Mars (directrice d’usine chez WBI). Qu’ils en soient toutes et tous remerciés.

Introduction

Le bassin alésien a construit sa dynamique industrielle autour des activités liées au charbon au cours des XIXe et XXe siècles ; la production de charbon a atteint son point culminant en 1958. Puis l’activité a décliné, et le tissu industriel a commencé à se déliter. Pourtant, l’industrie n’a pas disparu du territoire. Elle a changé de forme, certainement aussi d’importance dans l’activité économique, mais elle contribue toujours à définir l’identité du bassin alésien. La labellisation « Territoires d’industrie » du bassin alésien en est un signal.

Le déclin d’une telle activité minière, autour de laquelle était construite la vie de la population locale, affecte nécessairement l’ensemble du territoire dans ses dimensions économiques mais aussi démographiques, sociales et politiques. Comme l’écrit Sylvie Daviet (2006), la reconversion consiste alors en la réorganisation complète du territoire. Dans le cas des bassins houillers français, ce processus a d’abord été conduit en France par l’État puis par les acteurs locaux. À chaque fois, il a des conséquences à la fois sur la population, l’espace et les entreprises, mais il est aussi générateur de crises de différentes natures : emploi, confiance, identité, démographie.

Nous parlerons donc dans ce Doc des reconversions du bassin d’Alès, tel qu’il correspond au territoire labellisé « Territoires d’industrie », c’est-à-dire aussi à l’établissement public de coopération intercommunal (EPCI) Alès Agglomération1. Ces reconversions sont ici étudiées à partir d’entretiens auprès des dirigeants d’entreprise, des représentants des collectivités territoriales et des acteurs de la vie locale mais aussi d’archives et d’articles de presse concernant la conduite des programmes de reconversion du XXe siècle.

Dans un premier chapitre, nous évoquerons les différentes reconversions industrielles entre les années 1960 et aujourd’hui, qui montrent la construction dans le temps long du tissu industriel d’un territoire et de sa dynamique. Les recompositions géographiques, démographiques et sociales, qui sont liées pour partie à ces reconversions, seront abordées dans le deuxième chapitre, puis le renouvellement de l’action publique, notamment le passage de relai entre les Charbonnages de France et Alès Agglomération, dans le troisième chapitre. La recomposition de l’écosystème alésien et ses enjeux feront l’objet respectivement du quatrième chapitre et de la conclusion.

Figure I – Les 149 Territoires d’industrie

Source : Observatoire des territoires

  • 1 ‒ Sauf dans des cas spécifiques où c’est la zone d’emploi Alès-Le Vigan qui est considérée par les statistiques décrites dans ce Doc.
Chapitre 1

Les vagues de reconversion industrielle ou la difficulté de pérenniser les transformations

Parler des reconversions successives du bassin d’Alès, c’est avant tout évoquer la recomposition de son tissu industriel à travers le temps, tant au niveau des entreprises que des secteurs représentés. La fermeture des puits d’extraction du charbon s’est étalée entre les années 1960 et le début des années 20002. Sur cette période, se sont succédé deux périodes de régénération de son industrie. Il semblerait qu’on soit à présent entré dans une troisième phase.

Une première reconversion industrielle en demi-teinte

Historiquement, l’ouest du bassin d’Alès était caractérisé par la présence de deux industries : la culture du ver à soie pour le textile (hautes Cévennes autour d’Anduze, Saint-Jean-du-Gard et Saint-Ambroix) et la production de charbon (basses Cévennes, La Grand-Combe et Bessèges). Si l’élevage du ver à soie (sériciculture) remonte au début du XVIIIe siècle, ce n’est que vers le milieu du XIXe siècle que la mine s’est développée, bénéficiant notamment de la première ligne ferroviaire du Gard reliant Beaucaire et La Grand-Combe. En raison de crises sanitaires successives, et malgré la modernisation des activités de tissage, les villes qui s’étaient spécialisées dans le textile ont commencé à décliner, ce qui a bénéficié aux villes minières qui ont pu récupérer la main-d’œuvre dont elles avaient besoin. En 1911, le bassin d’Alès comprenait ainsi 5 000 ouvriers, 3 000 métallurgistes et 13 000 mineurs (Cuénot, 2020). Certaines villes comme La Grand-Combe ont été créées autour de l’activité minière et leur développement a été façonné par cette activité : des logements ont été construits pour accueillir les mineurs et les ouvriers, des commerces et des médecins s’y sont installés pour répondre aux besoins alimentaires et de santé, etc.

À côté de ces deux principales activités, la chimie s’est également développée dans le bassin d’Alès. La plateforme chimique de Salindres a été créée au milieu du XIXe siècle par Pechiney3, profitant de la présence de matières premières comme le charbon et de substances minérales4. Entre 1860 et 1890, elle fut l’unique centre industriel de fabrication de l’aluminium dans le monde.

Malgré la nationalisation des compagnies minières en 1946 et la création de l’établissement public Charbonnages de France pour participer à l’effort de reconstruction de l’économie française après la Seconde Guerre mondiale5, les puits du bassin d’Alès ont progressivement ralenti leur activité à partir des années 1960, avant d’être définitivement fermés en 19756. Des filiales de grands groupes se sont installées dans les années 1970 et 1980, parmi lesquelles SNR (roulements mécaniques, filiale de Renault), Merlin Gérin (équipements électriques, filiale de Merlin Gérin Grenoble), Rhône Poulenc (chimie), ATS (fonderie de précision, filiale de Microfusione). Celles-ci coexistaient alors avec des entreprises issues d’entrepreneurs locaux, à l’image de Richard Ducros, spécialisée dans la construction d’œuvres métallurgiques et créée au XIXe siècle, Jalatte qui fabrique des chaussures de sécurité, ou encore des fournisseurs de services tels que les Transports Capelle, fondés en 1951 par René Capelle aux Salles-du-Gardon pour transporter le charbon extrait sur place. Des groupes français originaires de la vallée du Rhône s’y installent également tels que Crouzet (moteurs électriques) et les Câbles de Lyon (production de fils et de câbles électriques).

Cet effort de reconversion présente cependant des résultats mitigés (Grosrichard, 1969 ; Guglielmo, 1985 ; Ramon, 2003). En effet, les nouvelles usines implantées dans les années 1960-1970 emploient une main-d’œuvre à la fois différente et limitée par rapport aux emplois de mineurs perdus : 3 500 emplois sont créés dans la construction électrique et électronique, la mécanique, la confection et la chaussure mais ces créations ne compensent pas les destructions de 15 000 emplois liées aux fermetures des mines (Guglielmo, 1985). Quant aux activités qui se sont maintenues, notamment dans la chimie comme les Tubes de Bessèges, les Forges de Tamaris ou encore l’usine chimique de Salindres, elles ont réduit leurs effectifs.

La nécessité d’une nouvelle reconversion industrielle

Les années 1990 et 2000 sont caractérisées par l’arrivée de nouveaux acteurs, spécialisés sur un nombre restreint de domaines qui préexistaient dans le territoire.

D’une part, le pôle mécanique Alès-Cévennes, constitué de six pistes d’essai automobile et d’une zone industrielle de 90 hectares spécialisée dans les activités de fabrication ou de service pour les secteurs auto et moto7, est implanté sur un ancien site minier à Saint-Martin-de-Valgalgues. Une centaine d’entreprises y sont aujourd’hui localisées et 900 personnes sont employées8.

D’autre part, des acteurs du secteur des éco-industries s’installent sur le site de Salindres. Ils visent le développement de nouveaux produits et procédés, qui permettent la réduction des impacts environnementaux et des risques de l’activité chimique. Ce secteur est aujourd’hui composé de 40 entreprises – uniquement des PME-PMI – et emploie 657 personnes.

Troisièmement, la filière agroalimentaire se décline quant à elle sur différents produits : plantes aromatiques et médicinales, bois et forêt, châtaignes, porc Baron des Cévennes, huiles essentielles. Des entreprises présentes sur le marché international se sont implantées sur le bassin d’Alès. Arcadie, créée en 1985, détient les marques Cook et Herbier de France, et fabrique une gamme de produits exclusivement issus de l’agriculture biologique : épices et aromates, plantes pour tisanes, thés, etc. Elle emploie aujourd’hui plus de 100 personnes. Fondée en 1987, Senfas fabrique des produits biologiques pour le réseau spécialisé et joue le rôle de négociant de produits biologiques pour les magasins et transformateurs. La viticulture s’est également spécialisée très tôt dans la filière biologique.

À cette époque, il existait également un engouement pour les biotechs. Les valeurs des start-up spécialisées dans ces activités montaient en bourse. Mabgène fondée en 1997 pour fournir des services de bioproduction (production de biomédicaments9) s’est inscrite dans cette vague mais cela n’a pas suscité l’implantation d’autres activités de biotechs sur le territoire.

Des PME actives dans d’autres secteurs ont également été créées. SDTech (1999), par exemple, analyse et produit des poudres qui constituent les matières premières pour de multiples industries (cosmétique, ciment, etc.). Citynox (2006), spécialisée dans la fabrication de pièces en inox et de mobilier urbain en inox et de façades de bâtiments prestigieux (comme celle du Mucem à Marseille ou celle de l’anneau de la Mémoire à Notre-Dame-de-Lorette), emploie 45 salariés.

En 2001, la plateforme chimique de Salindres est divisée en quatre entités : Rhodia qui vient de racheter Rhône Poulenc, Géo Gallium qui récupère les activités liées au gallium de Rhône Poulenc, Axens, fabriquant des catalyseurs et des supports de catalyseurs pour l’industrie des hydrocarbures et le groupement d’intérêt économique Chimie Salindres en charge de la gestion des utilités du site.

Plus globalement, ces années 1990 et 2000 sont marquées par un contexte mondial de fusions et acquisitions, qui se ressent sur le territoire alésien. Merlin Gérin est racheté en 1992 par Schneider Electric. SNR est racheté par NTN en 2007. Mabgène est racheté par LFB, le Laboratoire du fractionnement et des biotechs, détenu par l’État. Ces fusions et acquisitions entraînent généralement une perte d’autonomie décisionnelle des unités locales. Des fermetures comme celles d’Alcatel Câbles en 1998 et Furnon (fabrication de vêtements) en 1999 sont à déplorer. Dans le premier cas, elle est liée au choix de l’opérateur France Telecom de recourir à d’autres fournisseurs de câbles ; dans le second, la concurrence des pays low cost et des tensions entre les dirigeants10 ont eu raison du site cévenol. Après un rachat par GRME (électronique-mécanique), c’est au tour d’Alstom devenu AMSF de fermer en 2001.

Les années 2010 : un tournant ?

L’emploi salarié privé dans le secteur industriel a connu une diminution marquée après la crise de 2007-2008. Toutefois, la baisse a très largement ralenti sur la période 2013-2022.

Figure 1.1 – Évolution de l’emploi salarié privé à Alès Agglomération (2008-2022)

Sources : Acoss, URSSAF, 2008-2022

Nous noterons que la part de l’emploi salarié privé de l’industrie d’Alès Agglomération se situe en 2022 au même niveau que la région Occitanie (15 %) et que la France (15,5 %)11.

Plusieurs entreprises implantées durant les années 1970 ont fermé durant cette période entamée par une crise économique et financière, comme Jallatte dans le textile-habillement-cuir. D’autres comme Merlin Gérin, fabricant de disjoncteurs miniatures appartenant au groupe Schneider Electric, ont délocalisé une partie de leur activité tout en modernisant leur système de production afin de gagner en productivité et en parts de marché. Depuis 2021, le groupe a délocalisé des heures de travail en Hongrie et au Maroc – ce qui touche principalement les ouvriers non qualifiés12. Quant à l’autre employeur important du secteur de la fabrication d’équipement électrique, Crouzet Automatismes, spécialisé dans la conception, la fabrication et la commercialisation de moteurs et moto, il a fermé en 2022.

Dans le domaine de la métallurgie et de la mécanique, certaines entreprises n’ont pas subsisté non plus. C’est le cas de la fonderie Tamaris, liquidée en 2013, qui travaillait pour les grands donneurs d’ordre de l’automobile ou de l’hydraulique. C’est également le cas de Richard Ducros, rachetée en 2010 par Fayat et liquidée en 2015. Ces deux fermetures ont entraîné respectivement la destruction de 75 et de 230 emplois13.

À côté de ces fermetures, on note la présence de Solvay à Salindres depuis son opération publique d’achat (OPA) sur Rhodia en 2011 et le rachat d’ATS en 2012 par le groupe Marle, spécialisé dans les produits orthopédiques.

Figure 1.2 – Le tissu industriel d’Alès Agglomération exprimé en effectifs salariés du secteur privé en 202214

Sources : Acoss, URSSAF, NAF A38

Des entreprises implantées dans les années 1970 au cours de la première phase de reconversion, il n’en reste qu’une poignée. Différents facteurs peuvent expliquer cette déperdition : la concurrence internationale, la crise de 2007-2008 ou encore la faiblesse du marché local. Toutefois, des filiales de grands groupes (NTN, Axens, Schneider) demeurent ancrées dans le territoire. D’autres entreprises se sont implantées sur le territoire, amenant avec elles des nouvelles activités, à l’image d’ErgoSanté, qui conçoit et fournit des solutions ergonomiques sur mesure, dont des exosquelettes, pour améliorer les conditions de travail des personnes valides et non valides. C’est donc aujourd’hui un tissu diversifié d’entreprises et d’industries qui caractérise le bassin d’Alès, ce qui constitue « un atout pour le bassin alésien, un socle stable et un potentiel de développement », selon Annick Le Lan, directrice d’Alès Myriapolis.

  • 2 ‒ Le Bassin des Cévennes est composé de 21 puits en activité lorsque les fermetures sont amorcées. Au début des années 1970, seuls 4 d’entre eux demeurent actifs (Saint-Florent, Destival, Oules, Mercoirol-Pontil qui seront fermés respectivement en 1974, 1984, 1986 et 2001).
  • 3 ‒ Avant d’être connue sous le nom de Pechiney, la société s’appelait la Compagnie de produits chimiques d’Alais et de Camargue.
  • 4 ‒ Charbonnages de France (2004).
  • 5 ‒ Voir chapitre 3.
  • 6‒Selon le rapport de la Commission des Communautés européennes (1972), la production des mines du bassin des Cévennes était de 3,2 millions de tonnes en 1957 et de 1,5 million de tonnes en 1968. Les stocks de charbon étaient quant à eux de 243 000 tonnes en 1957 et de 1 million en 1968. Enfin, on dénombrait 20 000 mineurs en 1947, contre 5 616 en 1975.
  • 7 ‒ Par exemple le fabricant de pneumatiques de karting Véga ou de voitures de sport PGO.
  • 8‒Toutefois, certains fabricants ont quitté le site, comme le fabricant de motos de trial Scorpa en 2009.
  • 9‒Les biomédicaments sont fabriqués à partir d’organismes vivants comme des cellules animales ou des bactéries dont on modifie le patrimoine génétique et qui sont cultivées en masse.
  • 10 ‒ Selon L’Usine Nouvelle (1999).
  • 11 ‒ La forte spécialisation industrielle de la région toulousaine est contrebalancée par la « sous-industrialisation » d’une grande partie de l’ex Languedoc-Roussillon.
  • 12 ‒ Midi Libre (2021) et Migoule (2022).
  • 13 ‒ Voir Brouillet (2013) et Barrère (2015).
  • 14‒Voir aussi les publications de l’Observatoire Alès Cévennes sur leur site.
Chapitre 2

Des recompositions géographiques et socio-démographiques peu favorables

La fermeture des mines et les différentes phases de reconversion industrielle ont peu à peu modifié le profil de la population. Comme sur plusieurs anciens territoires miniers, on y a observé l’émigration des jeunes actifs, la montée du chômage, le poids important de l’action sociale, la faiblesse des emplois qualifiés, ainsi que le décrit S. Daviet (2006) dans les cas de la Lorraine et de Gardanne. Ces transformations démographiques et sociales du territoire montrent que la reconversion d’un territoire ne concerne pas uniquement l’emploi industriel mais aussi les enjeux de compétences, de logement, etc.

La tertiarisation du bassin et le vieillissement de sa population

Les décennies qui ont suivi la fermeture des mines sont caractérisées par une diminution de la population dans le cas d’Alès et de la Grand-Combe. Toutefois, les années 2000 marquent un tournant démographique. La ville d’Alès a retrouvé son niveau d’habitants de 1968 et l’agglomération d’Alès compte plus de 132 799 habitants en 2020 contre 114 000 en 2000. La Grand-Combe est quant à elle représentative de la dynamique négative des communes du nord du bassin où la population ne cesse de décroître.

Figure 2.1 – Nombre d’habitants d’Alès, d’Alès Agglomération et La Grand-Combe sur la période 1968-2020

Source : données issues de l’INSEE, RP 1967 à 1999 dénombrements, RP 2009 au RP 2020 exploitations principales, RP 2008 au RP 2019 pour La Grand-Combe et obtenues à partir du site Observatoire des territoires de l’ANCT. Elles sont établies à périmètre géographique identique.

La constitution d’Alès Agglomération

Entre 1993 et 2000, il existait une communauté de communes autour d’Alès appelé le Grand Alès. Depuis 2000 et suite à la loi Chevènement de 1999 [N.D.L.R. : loi de simplification et de rationalisation des établissements publics de coopération intercommunale], une communauté d’agglomération l’a remplacée et a intégré un nombre de plus en plus important de communes (9 communes puis 16 en 2002). En 2013, naît Alès Agglomération suite à la fusion entre le Grand Alès et des communautés de communes environnantes, ce qui porte le nombre de communes à 50. En 2023, l’agglomération comprend 72 communes, l’ensemble correspondant à la zone de chalandise d’Alès, selon Annick Le Lan.

La ville d’Alès profite du flux de population en provenance des petites villes de son arrière-pays. L’agglomération d’Alès, elle, bénéficie de flux migratoires de l’extérieur. De manière plus générale, l’Occitanie attire des habitants et constitue, selon l’INSEE, la deuxième région la plus attractive de France derrière la Corse et devant la Nouvelle-Aquitaine. La croissance démographique est liée à un solde migratoire positif, le solde entre les naissances et les décès étant nul. Elle est plus élevée en Haute-Garonne et dans l’Hérault que dans le Gard, où se situe Alès.

Mais ce flux de population se fait au profit d’une tertiarisation du bassin. La part de la sphère présentielle15 dans l’emploi total est passée de 52,4 % à 73,6 % entre 1975 et 2019 dans les villes composant l’agglomération selon les données de l’INSEE (RP 1975, 2019). Ce flux de population cache aussi des difficultés structurelles. La population du bassin d’Alès est caractérisée par le vieillissement croissant de sa population, plus qu’en Occitanie et sur le reste du territoire national. En 2019, la part des plus de 65 ans dépasse 25 % de la population quand celle des 15-29 ans est en dessous des 15 %. Le taux de personnes âgées a augmenté dans les petites villes du bassin en raison du départ des jeunes vers des pôles d’emploi plus importants (Cuénot, 2016). On notera que la désaffection des jeunes pour Alès est un phénomène ancien.

Figure 2.2 – Le vieillissement de la population

Source : données issues de l’INSEE, RP1968 à 1999 dénombrements, RP2008 au RP2020 exploitations principales et obtenues à partir du site Observatoire des territoires de l’ANCT. Elles sont établies à périmètre géographique identique.

Le vieillissement de la population entraîne bien évidemment des besoins en matière de santé. Or, le territoire est caractérisé par des déserts médicaux. En particulier, le nord et l’ouest du bassin alésien, zones anciennement minières, se heurtent à a une pénurie de médecins généralistes tandis que le sud et l’est y ont un accès supérieur à la moyenne nationale16. Toutefois, le territoire a été maillé de docteurs, de cliniques et de maisons de santé grâce au régime spécial de sécurité sociale des mines mis en place au cours des XIXe et XXe siècles (voir encadré). Ces personnels et infrastructures sont aujourd’hui gérés par la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM), ce qui permet de réduire un peu le phénomène de désertification médicale.

Un système de santé hérité des mines

À partir du XIXe siècle, un mode de protection sociale dédié aux mineurs et leurs familles, et couvrant les maladies et les accidents du travail, est progressivement créé autour des Sociétés de secours mutuel (SSM). Ces dernières rémunéraient les médecins et fournissaient gratuitement les médicaments aux patients. La Caisse autonome de retraite des ouvriers mineurs est créée en 1914 pour gérer les pensions de retraite déjà accordées par certaines SSM. Une offre de soins réservée aux mineurs se développe à travers la création d’établissements cliniques, laboratoires d’analyses médicales, cabinets médicaux spécialisés en ophtalmologie, centres de santé, maternités. Se développent également des actions sociales (aide à la personne, création de centres de vacances, etc.). Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ce régime spécial est géré par la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM). Ce système a finalement permis l’implantation d’un réseau de professionnels de santé à côté des mines pour les mineurs et leurs familles, aujourd’hui ouvert à tous via le réseau Filieris.

Un contexte socio-économique peu propice à l’emploi

Comme le reste de l’Occitanie, Alès souffre d’un taux de pauvreté plus élevé que le reste du territoire français. Selon les données de l’Insee, l’Occitanie est la troisième région de France, derrière les Hauts-de-France et la Corse, où les revenus sont les plus faibles.

Ainsi, en 2020, 19,6 % des habitants du Gard ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté, fixé à 60 % du niveau de vie médian en France métropolitaine (INSEE). Ce taux atteint 21,5 % pour Alès Agglomération, 28 % à Alès, 39 % à la Grand-Combe. En 2019, la part des bénéficiaires de l’aide au logement dans l’agglomération s’élevaient à 53,5 % (la part nationale est de 46,1 %).

Cette précarité est un phénomène structurel, de long terme, qui existait avant la fermeture des mines mais qui a été accentuée avec celle-ci. On note en effet que les revenus des mineurs, à l’époque, étaient plus élevés que ceux des autres travailleurs présents sur le territoire. Grosrichard (1969) souligne que, dans les années 1960, le salaire horaire dans les mines atteignait entre 3,85 francs et 5,85 francs, voire entre 4,30 et 6,30 francs si les avantages en nature étaient pris en compte. Ces montants sont à comparer avec les salaires hors des mines compris entre 3,40 et 5 francs.

De la même manière, Alès est frappée, comme le reste de l’Occitanie, par un fort taux de chômage, autour de 12 % aujourd’hui17. Comme l’a rappelé Christophe Rivenq, président d’Alès Agglomération au cours du séminaire de l’observatoire des Territoires d’industrie du 1er décembre 2022, ce taux était aux alentours de 25 % en 1995 ; même comparativement élevé, il a donc connu une évolution très favorable au cours des trois dernières décennies. Les vagues de fermetures d’usine que nous avons identifiées auparavant peuvent expliquer une partie de la persistance du chômage.

Figure 2.3 – Le taux de chômage localisé de la zone d’emploi Alès-Le Vigan entre 2003 et 2022

Source : INSEE, estimations de taux de chômage localisés.

Note : les chômeurs au sens du recensement de l’INSEE sont les personnes de 15 ans ou plus qui se sont déclaré chômeurs (inscrits ou non à Pôle emploi) sauf si elles ont déclaré explicitement ne pas rechercher de travail. Les personnes qui ont déclaré rechercher un emploi mais qui ne sont déclarées nulle part sont également comptabilisées. Cette définition diffère de celle du Bureau international du travail.

Enfin, et non sans lien avec le niveau élevé du chômage, l’agglomération d’Alès est également caractérisée par une forte proportion de jeunes peu diplômés : 25 % de la population âgée de plus de 15 ans n’a soit aucun diplôme soit un certificat d’études primaires, 28 % a un niveau BEP/CAP en 2020. Malgré une évolution favorable durant la dernière décennie (figure 2.4), cette absence de formation initiale pour un quart de la population en âge de travailler apparaît clairement comme un frein à l’emploi. Par ailleurs, le bassin d’Alès compte un faible nombre d’établissements d’enseignement supérieur, ce qui entraîne un flux sortant très important chez les 20-29 ans, sans que ces populations ne reviennent nécessairement à la fin de leurs études.

Figure 2.4 – Diplôme le plus élevé de la population non scolarisée de 15 ans ou plus sur Alès Agglomération en 2009 et en 2020 (en %)

Source : INSEE RP 2009, RP 2020, exploitations principales, géographie au 1er janvier 2023.

Le retournement de l’avantage géographique

L’industrie est née sur les contreforts des Cévennes, à l’ouest d’Alès. La culture du ver à soie s’est développée à basse altitude, les châtaigniers qui fournissaient l’alimentation des vers n’appréciant pas trop les hauteurs. Les bassins miniers, eux, se trouvaient plutôt dans les hautes Cévennes. Ce territoire montagneux était ainsi le lieu des richesses du territoire.

Aujourd’hui, la situation est différente. La plupart des personnes interrogées citent l’enclavement du territoire comme un frein à son dynamisme. Cet enclavement est particulièrement prégnant pour les petites villes du nord et de l’ouest de l’agglomération, qui subissent un déclin démographique. À l’opposé, la plaine de l’est et du sud d’Alès est beaucoup plus dynamique et attractive (Cuénot, 2020). Cette zone bénéficie notamment des infrastructures routières la reliant à Nîmes, et plus généralement d’une plus grande accessibilité et d’une meilleure desserte numérique et téléphonique. Cette desserte reste néanmoins limitée en raison de l’inachèvement de la 2×2 voies entre les deux villes, alors que le chantier a débuté à la fin des années 1990.

Cette opposition entre les deux moitiés du territoire est renforcée par le très faible développement des transports en commun, même si certaines lignes ferroviaires régionales doivent rouvrir, à l’image de celle reliant Alès à Bessèges via Salindres et Saint-Ambroix. Initialement ouverte pour servir l’industrie minière dans les Cévennes, la ligne pour les voyageurs a été supprimée en 2012 ; seul un train de marchandises circulait sur cette ligne pour servir la plateforme chimique de Salindres. Résultat, la voiture demeure le principal moyen de transport des habitants (87 % selon Dataviz Territoires d’industrie).

Enfin, les risques d’inondation et de feux de forêt sont très prégnants dans l’agglomération : 63 communes sur les 76 qui la composent sont couvertes par un plan de prévention des risques naturels. Ces risques font que beaucoup de zones ne sont pas constructibles pour l’industrie.

Ainsi, le bassin alésien voit une partie de sa population exclue du marché de l’emploi tandis que les villes qui ont fait sa richesse par le passé se retrouvent isolées de la dynamique économique.

  • 15 ‒ Selon l’INSEE, les activités de la sphère présentielle regroupent les « activités orientées vers la satisfaction des besoins des marchés locaux (personnes résidentes et touristes). On retrouve dans ces activités les services aux particuliers, l’éducation, la santé, l’action sociale, l’administration publique, la construction, le commerce de détail, la fabrication de produits alimentaires, l’hôtellerie et la restauration, le transport de voyageurs ou encore les activités financières et immobilières. »
  • 16‒Voir la carte interactive de la fracture sanitaire proposée par l’Union fédérale des consommateurs-Que Choisir. Pour mesurer la fracture sanitaire, UFC-Que Choisir et la Skema business school ont construit un indicateur d’accessibilité. Ce dernier mesure le nombre de médecins accessibles par patient potentiel et par commune au sein d’une zone autour de la commune (30 minutes de trajet en voiture).
  • 17‒En Occitanie, le taux de chômage est de 9,3 % avec des disparités entre les départements.
Chapitre 3

La volonté politique et les outils de reconversion

La fermeture des mines françaises a été accompagnée par des programmes de reconversion menés par l’État, à Alès comme dans le reste des bassins houillers. Si les résultats en matière d’emplois sont mitigés, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, la force du bassin d’Alès est d’avoir su cultiver cet héritage. Comme l’indique Annick Le Lan, les acteurs locaux ont poursuivi la dynamique impulsée par l’État pour finir par créer la leur.

Des Charbonnages de France à Alès Agglomération : le passage de témoin

Les instruments sur mesure des Charbonnages de France

Si la reconversion des régions minières s’est appuyée sur des financements européens (fonds structurels) et nationaux (Fonds national d’aménagement du territoire, par exemple), les pouvoirs publics français ont surtout créé des outils dédiés aux territoires en fonction de leurs spécificités. Ainsi, très tôt, la société des Charbonnages de France, initialement créée pour relancer la production de charbon après la Seconde Guerre mondiale, a organisé la reconversion industrielle des territoires fragilisés. Son rôle a non seulement été de favoriser l’implantation de nouvelles activités mais aussi de programmer la baisse de l’activité destinée à s’éteindre et de gérer la reconversion ou le départ des salariés. Les nouvelles activités sont des activités connexes à celles déjà en place ou des activités qui ont un potentiel de développement. À partir des années 1970, la politique de reconversion et d’industrialisation des bassins miniers vise à assurer l’emploi des jeunes et à réduire le sous-emploi féminin.

Charbonnages de France

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le charbon est la seule source d’énergie dont dispose la France. Il devient central dans la stratégie de reconstruction. Les bassins de charbon sont nationalisés et la société des Charbonnages de France est créée pour contrôler, fixer les objectifs et coordonner les activités des houillères de bassins (Nord-Pas-de-Calais, Lorraine, Loire, Cévennes, Blanzy, Aquitaine, Provence, Auvergne, Dauphiné). Les mines sont modernisées et électrifiées, grâce aux programmes d’investissement financés par l’État. En 1960, la production atteint 578 millions de tonnes et les effectifs représentent de l’ordre de 216 000 personnes. Du fait de la nationalisation des bassins, les logements construits par les compagnies minières se retrouvent dans le bilan de Charbonnages de France, qui participe à leur rénovation. Pénalisée, face à la concurrence du charbon étranger et des autres énergies, par des coûts d’extraction élevés, l’industrie minière commence à décliner à partir de 1960. Le charbon assure encore 30 % de la production française d’électricité mais devient progressivement marginal. La politique du « tout nucléaire » décidée dans les années 1970 entraîne l’éviction du charbon comme source d’électricité. La consommation finale de charbon diminue, y compris dans le secteur sidérurgique et dans le secteur résidentiel (chaleur). Après un ultime essai de relance entre 1981 et 1983 suite aux chocs pétroliers de 1973 et 1979, les pouvoirs publics décident la fermeture des exploitations déficitaires. Le Pacte charbonnier de 1994 scelle la fin de la production de charbon en France à l’horizon 2005.

Source : de Ladoucette (2004)

Différents outils de reconversion pilotés par les industriels, les collectivités et les administrations18 ont donc été mis en place par l’État, via Charbonnages de France, à partir des années 1960 pour assurer la reconversion des bassins houillers. Le premier est une agence territoriale de développement, l’Association pour le développement industriel et la reconversion de la région d’Alès (ADIRRA) devenue par la suite l’Association pour le développement industriel du bassin alésien (ADIRA), devant prendre le relai de Charbonnages de France en matière de prospection industrielle. Elle a déployé différents moyens à destination des entreprises, allant de l’offre de terrains et de bâtiments à des conditions favorables à la prise en charge de la formation des salariés en passant par du conseil (de Ladoucette, 2004).

Un deuxième outil est constitué par les interventions financières auprès des entreprises de la SOFIREM, la Société financière pour favoriser l’industrialisation des régions minières. Créée en 1967, elle vise à favoriser la création et le développement d’entreprises dans les bassins miniers, en prenant notamment des participations minoritaires dans les entreprises qui s’implantent sur le territoire ou dans celles déjà installées qui y développent leur activité19. L’aide est conditionnée à l’emploi d’anciens mineurs20. Les établissements Sabatier, acteurs de la métallurgie, ont été les premiers à bénéficier de ces aides sur le bassin d’Alès (Commission des Communautés européennes, 1972).

Ces deux instruments21 n’ont pas réussi, durant leurs premières années de vie, à redynamiser vraiment le tissu local. Comme le souligne le rapport de la Commission des Communautés européennes de 1972, aucune nouvelle entreprise ne s’est implantée dans le bassin d’Alès. Les aides ont principalement bénéficié au développement d’entreprises déjà installées, sans créer plus de 500 emplois. À partir de 1970, le territoire a néanmoins vu arriver SNR, filiale de Renault créée pour bénéficier de la main-d’œuvre disponible du fait de la fermeture des mines, puis Rhône-Poulenc, Merlin Gérin, Crouzet.

L’attractivité de nouvelles entreprises était pourtant nécessaire pour assurer la reconversion des mineurs et l’emploi des jeunes travailleurs. Deux des leviers de cette attractivité ont été le développement d’infrastructures routières et de communication ainsi que la création de zones industrielles. Des aides ont ainsi été accordées par l’État pour aménager le territoire, via le Fonds d’intervention pour l’aménagement du territoire22 mobilisé en octobre 1968 pour l’amélioration des routes et le réseau téléphonique à Alès, pour un montant de 4,7 millions de francs (selon le convertisseur proposé par l’Insee, le pouvoir d’achat de 1 franc en 1968 est le même que celui de 1,34 euro en 2022). La Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) a également octroyé des aides destinées à la reconversion industrielle23 : elle a financé en 1969 une nouvelle zone industrielle d’environ 100 hectares au sud d’Alès. À cette époque, une seule zone industrielle existait à Alès. Notons que la société des Charbonnages de France avait recensé les zones industrielles dans un annuaire, écrit en plusieurs langues et précisant leurs caractéristiques (superficie, contexte économique, etc.) à destination d’entreprises qui chercheraient un lieu d’implantation.

Enfin, le Fonds d’industrialisation du bassin d’Alès (FIBA) créé en 1984 visait à accompagner les porteurs de projets, principalement en matière de foncier et d’immobilier d’entreprise, de compétences et d’entreprenariat. Plus précisément, il a contribué à moderniser les bâtiments, créer des filières de formation professionnelle et implanter des pépinières d’entreprises.

Le FIBA et la SOFIREM ont constitué des instruments complémentaires, comme l’illustre leur participation commune à la création d’un fonds d’amorçage sur le bassin d’Alès en 2001. L’objectif de ce fonds est de faire émerger des projets innovants et de favoriser leur ancrage dans le territoire. Il permet le financement des phases préalables à la création d’entreprises (étude de marché, réalisation de prototypes, etc.), sous la forme d’avances remboursables dans le cas de personnes physiques ou de participations en capital pour les sociétés. La SOFIREM joue également le rôle de conseiller auprès des porteurs de projet, notamment dans la phase d’élaboration du modèle d’affaires.

L’entreprise agroalimentaire Senfas est ainsi venue dans la région d’Alès en raison de l’accompagnement proposé par l’Adira et le FIBA : elle a pu bénéficier d’un bâtiment et plus généralement, selon les mots de son fondateur Michel d’Ozenay, d’un « environnement favorable pour passer de l’artisanat à l’industrie ». Si les instruments de reconversion ont été créés initialement pour compenser les pertes d’emplois liées à la fermeture des mines, en recréer et renouveler le tissu d’entreprises, ils ont plus généralement servi le développement local. Quand Rhône Poulenc a été contraint d’arrêter la production de chlorofluorocarbone, dangereuse pour l’environnement et la santé, le site de Salindres a bénéficié de fonds de Charbonnages de France afin de compenser les suppressions d’emplois qui en ont découlé et d’attirer des entreprises sur le bassin. C’est comme ça que CTI, devenue aujourd’hui Alsys France CTI, spécialiste des matériaux céramiques dédiés à la filtration des liquides et à la catalyse des gaz, s’est installée en 1990 à Salindres.

L’industrie au cœur du projet de territoire d’Alès Agglomération

La politique de reconversion s’est poursuivie dans les années 1990, portée par Max Roustan, élu en 1995, et par son équipe. Cette équipe est toujours à la tête de la ville. Une telle stabilité politique, qui a permis d’inscrire cette politique dans la durée, est sans contexte une force pour le bassin, soulignent Annick Le Lan et Jean Rampon24.

Fraîchement élu maire en 1995, Max Roustan a défini avec son équipe un nouveau projet de territoire, basé sur trois piliers. Un de ces piliers était la construction d’Alès comme pôle industriel du Languedoc-Roussillon. Déterminés « à se prendre en main » pour anticiper la fin de Charbonnages de France, les élus de la ville d’Alès ont lancé dès 1995 le projet de pôle mécanique Alès Cévennes, autour des métiers et des sports mécaniques. Celui-ci a vu le jour en 1999 et, depuis vingt ans, a permis la création de plus de 1 000 emplois. Plus généralement, la ville d’Alès puis Alès Agglomération se sont mobilisées pour mettre au point une politique de développement économique local, dans laquelle les reconversions industrielles joueraient un rôle important. Dans le schéma de cohérence territoriale (SCOT)25 de 2013, il est clairement énoncé que « la vocation industrielle du bassin d’Alès doit être affirmée comme un élément structurant du Pays des Cévennes ».

La création du Pôle mécanique a ainsi marqué la volonté de faire émerger une nouvelle filière d’activité industrielle, autour des tests industriels et des compétences en mécanique. Il constitue moins un levier d’attractivité touristique du territoire qu’un outil au service de son développement économique, selon Jalil Benabdillah, vice-président de la région Occitanie en charge de l’économie, l’emploi, l’innovation, la réindustrialisation et ancien vice-président d’Alès Agglomération. Il met ainsi à disposition des infrastructures et des équipements aux constructeurs pour effectuer des tests industriels. La structure appartient à l’agglomération d’Alès, ce qui témoigne de sa fonction dédiée au développement local.

Les deux autres piliers du projet de territoire étaient – et sont encore – le développement durable et la promotion de la culture pour « fédérer la population ».

De l’ADIRA à Alès Myriapolis

L’action de Charbonnages de France était limitée dans le temps. Mais, au lieu de faire disparaître l’ADIRA, les communes de l’agglomération d’Alès, la communauté de communes Cèze-Cévennes et la sous-préfecture d’Alès se sont mises d’accord pour conserver la structure sous une forme différenciée. Elle est devenue une agence de développement économique, Alès Myriapolis, l’une des premières implantées en France.

À ses débuts en 1999, l’agence Alès Myriapolis avait été pensée comme un technopôle : l’idée était alors de réunir les dispositifs d’aide et des acteurs (le FIBA, la SOFIREM ainsi que les laboratoires de recherche de l’école des Mines) et de les faire fonctionner ensemble. Aujourd’hui, en tant qu’agence de développement, elle accompagne la création d’entreprises innovantes et l’implantation d’entreprises26, avec l’appui de la société anonyme d’économie mixte Alès (SAEM’Alès). Créée en 1992, la SAEM fournit des locaux aux entreprises – elle gère en 2022 8 200 m2 – situés principalement sur le parc industriel scientifique et technologique (« PIST »). Les entreprises peuvent s’y installer pour une durée de 36 mois à un tarif préférentiel. Elles peuvent également bénéficier d’un accompagnement sur mesure, de conseils et d’une mise en relation avec des fournisseurs.

On peut recenser plusieurs exemples d’accompagnement d’entreprises par Alès Agglomération et son agence dans leur recherche de foncier.

En 2010, le groupe japonais NTN, qui a racheté SNR en 2007, souhaite produire une nouvelle génération de roulements mécaniques pour répondre aux besoins du marché automobile et doit décider du site, parmi ceux qu’il possède, devant accueillir cette nouvelle activité. Trois facteurs ont joué en faveur du site d’Alès : le fait que la nouvelle chaîne de production allait être très automatisée – ce qui limitait l’avantage des pays low cost, le fait que l’approvisionnement et la livraison des produits en France, en Italie et en Allemagne, via le port de Marseille, faisaient du site d’Alès un atout, et enfin l’implication de l’agglomération pour acquérir un foncier en 10 mois, adapté à la mise en œuvre de cette nouvelle ligne de production. L’agglomération a racheté un bâtiment industriel de plus de 9 000 m2, laissé vacant par Richard Ducros, l’a rénové et l’a mis à la disposition de NTN. Ce dernier y a implanté, entre 2012 et 2020, huit nouvelles lignes de production.

Selon Christophe Rivenq, les entreprises « doivent être libérées de ces préoccupations foncières et immobilières pour se consacrer aux investissements industriels proprement dits. Dans le cas de NTN-SNR, les huit lignes de fabrication représentaient un budget de 45 millions d’euros. Pour ce projet, nous avons été mis en concurrence non seulement avec la Roumanie, mais aussi avec le Brésil, le Japon et Annecy. C’est parce que nous avons été les plus réactifs dans l’identification et l’aménagement d’un site industriel que nous l’avons emporté. »

L’accompagnement foncier par les acteurs publics locaux a également été déterminant pour Dexel, en l’occurrence sur une friche industrielle. L’ancien site occupé par les Câbles de Lyon – 10 000 m2 de bâtiments de production – a en effet été racheté et réhabilité par l’entreprise avec l’aide de l’agglomération.

Plus généralement, l’agence a toujours fonctionné avec les industriels. À ses débuts, elle a été co-financée par des industriels locaux et aujourd’hui, outre les vice-présidents des EPCI, elle comporte dans son organigramme un représentant de Schneider Electric et la directrice de l’école des Mines.

Des programmes de reconversion à la contractualisation

Les programmes nationaux de reconversion industrielle n’existent plus et l’intervention de l’État dans les territoires s’exerce de manière décentralisée depuis les années 1980. En outre, les institutions publiques locales ont été invitées à répondre à différents programmes de labellisation et appels à projet, successivement lancés par les gouvernements en matière d’aménagement du territoire : la politique de cluster autour des systèmes productifs locaux (SPL) dans les années 2000, Action cœur de ville (Alès), Territoires d’industrie (Alès Agglomération), Petites villes de demain (Anduze et La Grand-Combe, Saint-Hilaire-de-Brethmas, Saint-Jean-du-Gard) dans les années 2010 et, depuis mai 2023, le programme Rebond industriel. Ces dispositifs apportent soit des financements directs, soit des aides à l’ingénierie de projets, à l’animation des projets ou à la communication. Un autre encore, le Fonds national de revitalisation des territoires, visant au maintien ou à la création d’emplois pour redynamiser des territoires touchés par les fermetures et les restructurations d’entreprise suite à la crise économique de 2007-2008, avait aussi bénéficié à Alès en 2009.

Dans le cadre de France Relance, le fait d’avoir déjà réfléchi en amont à des actions à mettre en place, via notamment le programme Territoires d’industrie, a contribué au succès en matière de lauréat des subventions.

Enfin, l’agglomération d’Alès compte trois quartiers labellisés « Quartiers prioritaires de la politique de la ville » (QPPV). Ces quartiers définis par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 bénéficient d’avantages fiscaux, de dispositifs d’aide et d’un accompagnement particulier en raison des difficultés que connaissent les habitants de ces territoires. À ce titre, Alès va bénéficier du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) visant à transformer les quartiers.

Enfin, notons que si la réindustrialisation est au cœur du projet de territoire d’Alès, elle est aussi une des priorités de la région Occitanie. Cela s’explique notamment par la présence de la filière aéronautique dans le bassin toulousain.

  • 18 ‒ Respectivement les outils « institutionnels », « actions collectives » et « interventions financières auprès des entreprises » selon Trink (2004) et Charbonnages de France (2004).
  • 19 ‒ La SOFIREM finançait aussi les entreprises via des prêts participatifs de moyen terme mais nous n’avons pas trouvé d’exemple sur le bassin alésien.
  • 20 ‒ Plus précisément, les entreprises bénéficiant des aides devaient signer des conventions d’emploi avec la direction régionale de la Main-d’œuvre (sous l’autorité du ministère des Affaires sociales de l’époque), et parfois avec les Houillères. Les entreprises devaient communiquer à la direction départementale du Travail et de la Main-d’œuvre leurs besoins de personnel et le calendrier prévu des recrutements.
  • 21 ‒ La coordination de ces instruments entre les acteurs locaux et l’État est assurée par un commissaire à la reconversion industrielle (par ailleurs commun avec Saint-Étienne) depuis 1967. Ce commissaire travaille sous la direction des préfets de région.
  • 22‒Le Fonds d’intervention pour l’aménagement du territoire a participé à une cinquantaine d’opérations entre 1966 et 1970 dans la France. Cela a représenté un montant d’environ 100 millions de francs (de Ladoucette, 2004).
  • 23 ‒ Sinon, la majorité de la construction des zones industrielles a été financée en France par la Caisse des dépôts et consignations et par le Fonds national d’aménagement foncier et d’urbanisme.
  • 24 ‒ Le mandat de Pierre Méhaignerie à Vitré est également marqué par une longue stabilité, qui a favorisé la mise en place de projets dans la durée.
  • 25‒Document de planification qui détermine l’organisation spatiale et les grandes orientations de développement d’un territoire, à l’échelle d’un EPCI ou PETR.
  • 26 ‒ Alès Myriapolis porte aussi un fonds d’amorçage et réalise des études économiques ou de système d’information géographique. Elle a mis en place un observatoire socio-économique.

L’effort collectif de recomposition de l’écosystème industriel

Élus, industriels, organismes de formation : tous participent à la régénération de l’écosystème industriel alésien. La recherche de synergies entre eux est particulièrement notable, même si cet effort ne mène pas au rebond attendu en matière d’emploi. Cela passe aussi par la créativité des acteurs locaux, comme l’affirme la signature territoriale de la ville adoptée récemment, le « Sud ingénieux ».

L’IMT Mines Alès au service du développement local

Selon les mots de Louis Gallois lors du séminaire de l’observatoire des Territoires d’industrie du 1er décembre 2022, ce qui fait la force de l’IMT Mines Alès est son insertion dans son environnement. Cette insertion est le fruit de son adaptation face aux transformations du bassin alésien ainsi qu’à l’évolution de la place des ingénieurs et de la recherche en France.

Créée en 1843 par la ville d’Alès, elle est d’abord une école d’enseignement technique dédiée aux métiers liés à l’exploitation des mines. Comme le souligne Turion (2002), de sa création aux années 1960, elle n’aura de cesse de faire reconnaître son niveau et d’obtenir le titre d’école d’ingénieur. À cette quête s’ajoutent les difficultés rencontrées par l’école dans les années 1950, liées à la baisse programmée de la production de charbon et à l’indépendance accordée aux anciennes colonies, dont les exploitations étaient pour certaines dirigées par des diplômés de l’école. Les efforts combinés des anciens élèves, des dirigeants alors à la tête de l’école et des élus, en plus de la décision du ministère de l’Industrie de supprimer le stage dans les mines et de recruter au niveau bac (Escudier, 2018), lui permettent de devenir en 1966 une école d’ingénieur au service de l’enseignement supérieur. Dès lors, ce ne sont plus les enfants d’ouvriers qui sont majoritaires dans l’école mais ceux des catégories socioprofessionnelles plus favorisées (Turion, 2002, cité par Escudier, 2018).

Puis l’école ajoute la recherche à ses missions dans les années 1980-1990, ce qui favorise le renouvellement de ses relations avec le monde industriel, grâce notamment aux activités de transfert de technologies. Elle se dote d’un incubateur en 1984, qui accueille des porteurs de projet nécessitant un soutien. Ainsi, l’école contribue au développement local – la mission est d’ailleurs inscrite dans ses statuts – jusqu’à une échelle régionale. Cet incubateur permet aux entreprises de bénéficier des compétences des chercheurs et du matériel des laboratoires de l’école, tout en leur apportant un accompagnement en matière de stratégie, de faisabilité économique et de financement de leur projet. Dans la même logique, on note que les enseignants-chercheurs suivent les projets des entreprises, conseillent les entrepreneurs et les accompagnent dans l’utilisation des infrastructures de l’école.

Le succès de l’incubateur a mené l’école à établir un partenariat avec HEC, afin de former des « ingénieurs entrepreneurs ». Plusieurs outils pédagogiques ont alors été introduits, comme les missions de terrain durant lesquelles des équipes de trois élèves se rendent cinq semaines en entreprise27 pour y travailler sur une problématique particulière (par exemple l’optimisation des chutes dans une entreprise de découpe) tout en se formant. 2 000 conventions de stages, de missions de terrain ou de recherche partenariale avec des entreprises sont signées chaque année par l’école. Elle sera finalement choisie comme pilote par le ministère de l’Industrie pour sa formation d’ingénieur-entrepreneur.

Par exemple, à la fin des années 1990 et au début des années 2000, Frédéric Burgals, dirigeant de Dexel, entreprise spécialisée dans les matériaux pour le bâtiment, a conçu un nouveau béton décoratif prêt à l’emploi au sein de l’incubateur de l’école. L’appui de l’école ne s’est pas arrêté à la phase de conception du produit, qui a duré deux ans, et s’est poursuivi une fois l’entreprise implantée dans un local, en phase de commercialisation. L’entreprise continue notamment d’utiliser les machines de l’école. En retour, elle accueille des élèves dans le cadre de missions terrain, dont certaines ont mené à des dépôts de brevets, ainsi que des élèves en mécatronique en alternance. SDTech a aussi bénéficié à la même époque de l’incubateur pour se lancer.

L’école accueille constamment entre 15 et 25 créateurs d’entreprises. Lorsque les entreprises sortent de l’incubateur, elles sont orientées vers Alès Myriapolis qui les aide à trouver un lieu d’implantation, des sous-traitants et les accompagne dans leur développement. Cette implantation se fait au sein d’un périmètre régional. Dans le cadre de France Relance, l’école a bénéficié du fonds d’accélération des investissements industriels sur les territoires pour la mise au point d’une ligne de production automatisée qui servira à former les jeunes et les salariés des entreprises locales.

Jusqu’en 2003, les directeurs de l’école ont occupé leur fonction de manière simultanée avec celle de directeur en charge de l’industrie au sein de la Région (DRIRE), leur conférant un lien privilégié avec les industriels locaux. Comme le rappelle Turnon (2002), l’école a toujours donné de l’importance aux stages et à l’insertion en entreprises ainsi qu’à la formation continue. L’alternance représente aujourd’hui la voie choisie par un tiers de ses diplômés.

L’IMT Mines Alès participe également à l’inclusion des personnes éloignées de l’emploi, en offrant notamment une formation à la fabrication additive à destination des demandeurs d’emploi, afin de leur faire découvrir les nouveaux métiers de la conception numérique et de l’impression 3D et d’accroître leur employabilité.

Des formations locales adaptées

Outre l’IMT Mines Alès, des formations locales ont été mises en place pour fournir une main-d’œuvre compétente aux firmes minières du bassin puis pour convertir les salariés. Avant l’institutionnalisation de la formation professionnelle en 1938, ce sont les compagnies minières qui formaient leurs salariés. Un centre d’apprentissage a été créé au début des années 1940 par la Compagnie des Forges d’Alais. Après 1946, Charbonnages de France consacre une part croissante de son budget à la formation professionnelle et un véritable cursus se met en place autour de la formation des métiers de la mine : CAP, école de maîtrise, école d’ingénieurs et de cadres.

Le programme de reconversion des années 1960 et 1970 encourage la mobilité des mineurs vers d’autres secteurs d’activité, principalement le bâtiment et la métallurgie. Un centre de formation professionnelle pour les adultes (AFPA) est mis en place en 1972 à La Grand-Combe dans les locaux du centre d’apprentissage. On notera ici une sorte de division du travail entre les organismes de formation du territoire : l’AFPA forme aux compétences techniques, initialement du ressort de l’école des Mines, tandis que cette dernière favorise la formation d’une main-d’œuvre capable de mettre en œuvre des projets novateurs. Mais comme le souligne Escudier (2018), la reconversion des mineurs par la formation offerte par l’AFPA est insuffisante au regard des compétences demandées sur le marché de l’emploi qui se tertiarise dans les années 1980. D’autres formations, davantage tournées vers l’acquisition de compétences dans les langues ou la comptabilité, seront proposées aux anciens mineurs, à côté de primes permettant la reprise d’un commerce ou d’un artisanat.

Aujourd’hui, demeurent des formations locales qui fournissent une main-d’œuvre compétente aux firmes du bassin. Le lycée professionnel Jean-Baptiste Dumas propose ainsi des CAP, secondes professionnelles et bacs professionnels « maintenance des véhicules », ainsi qu’un bac pro « technicien en réalisation de produits mécaniques », en lien avec les activités du Pôle mécanique. Il offre aussi des formations dans le domaine de la chimie (bac professionnel « procédés de la chimie »), en chaudronnerie industrielle (bac professionnel « technicien ») ou encore un bac pro « métiers de l’électricité et de ses environnements connectés » en lien notamment avec les activités de Merlin Gérin. Sept BTS dans le domaine industriel complètent cette offre de formation. L’association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) d’Alès-La Grand-Combe continue de proposer des formations dédiées au secteur industriel et en particulier à la métallurgie : soudeur, tourneur, technicien de production industrielle, fraiseur.

Néanmoins, le territoire alésien a perdu le pôle de formation de l’UIMM, qui s’est déplacé à Laudun-l’Ardoise, à l’est du Gard, à proximité de Bagnols-sur-Cèze, territoire rattaché à la filière nucléaire. Des formations (bacs professionnels et BTS) en chaudronnerie y sont proposées, ainsi qu’une formation en équipements électriques.

À côté de ces formations aux métiers historiques, d’autres sont progressivement introduites sur le territoire, correspondants aux besoins futurs. Ainsi, les compétences en numérique ont été ajoutées à l’escarcelle de l’école des Mines par l’absorption en 1998 d’une école d’ingénieurs basée à Nîmes. Par ailleurs, suite à une enquête réalisée par Alès Myriapolis auprès des entreprises du territoire, a émergé le besoin de former des étudiants au lean manufacturing et à l’optimisation des process industriels. C’est pour répondre à cette demande qu’une licence professionnelle dédiée à la conception et à l’amélioration de processus et des procédés industriels (LP CAPPI) a été mise en place par le CNAM en partenariat avec le lycée Jean-Baptiste Dumas et le GRETA du Gard en 2021 pour former des techniciens en fabrication additive ou des techniciens robotique et cobotique.

Les acteurs du territoire se disent parfaitement conscients que la seule existence de formations n’est pas une garantie suffisante pour réduire le chômage. Pour Christophe Abella, directeur Emploi-Formation de l’UIMM Occitanie, « quand on travaille sur l’emploi, on sait qu’on doit travailler sur l’écosystème ; on sait aussi que l’approche est différente selon que l’on s’adresse aux jeunes, aux demandeurs d’emploi et aux salariés. Pour les jeunes, il s’agit de leur faire découvrir l’industrie. Du côté des demandeurs d’emploi, il s’agit de les reconvertir ; pour cela, il faut les convaincre, vérifier leurs capacités et faire ressortir leurs habiletés. Pour les salariés, il s’agit principalement de les faire monter en compétences. »

Des réseaux d’acteurs solidaires

Le territoire alésien est maillé de réseaux d’acteurs de différentes natures. Leader Alès, créé en 2014, regroupe ainsi les entreprises qui connaissent une croissance historique, qui ont une stratégie de développement ambitieuse ou qui sont très impliquées dans le développement local. Ce groupement poursuit plusieurs objectifs, dont le partage d’expériences et de problématiques et la défense des intérêts communs de ses membres. Il fait partie du réseau régional Leader Occitanie, créé en 2009 par les chefs d’entreprise et le Conseil régional de Languedoc-Roussillon, et structuré en grappes territoriales afin de mailler la région.

Des lieux sont en outre créés pour accompagner les porteurs de projet autour du numérique et de l’innovation, et pour faciliter la mise en réseau des entreprises, des salariés et des acteurs de la formation. C’est le cas de l’hôtel d’entreprises Innov’Alès, qui s’insère dans le Science Park de l’école des mines d’Alès. Innov’Santé et Enerpôle (secteur des énergies renouvelables) sont deux autres exemples d’hôtels d’entreprises. Les start-up du numérique bénéficient quant à elles de Digit’Alès, tiers-lieu dédié au numérique où coexistent des formations, une pépinière d’entreprises et un espace de coworking28.

Troisièmement, les réseaux de sous-traitants locaux dans les domaines de la métallurgie ou des équipements électriques constituent un autre atout pour des entreprises comme Dexel. « Au sein du groupe Sika, qui compte 12 sites industriels en France, Dexel se distingue par sa créativité, sa flexibilité et sa réactivité. Grâce notamment à notre partenariat avec l’IMT, mais aussi à notre réseau de sous-traitants locaux capables de nous fournir des prestations de chaudronnerie, de tournage, de fraisage ou d’automatisation, c’est notre filiale qui est régulièrement sollicitée pour tester les nouveaux produits, étudier la façon de les industrialiser, participer à la conception de nouvelles machines. La taille de notre territoire nous permet de connaître l’ensemble des interlocuteurs, y compris les agences d’intérim qui nous procurent le personnel nécessaire à notre flexibilité. Comme nous disposons de peu de sous-traitants et que, de leur côté, ils ont un petit nombre de clients, nous sommes tous obligés de travailler sérieusement et en confiance ! » (Frédéric Burgals, directeur d’usine).

Plus récemment, en janvier 2022, Alès Agglomération a ouvert le Hup, le « hub des entrepreneurs », un guichet unique à destination des entreprises, en plein centre-ville d’Alès. Il regroupe tous les acteurs du développement économique : l’agence de développement Alès Myriapolis, le service de développement économique d’Alès Agglomération, la chambre de commerce et d’industrie du Gard, la chambre des métiers, la maison de la région Occitanie et le Plan local pour l’insertion et l’emploi. Son but est d’accompagner les entreprises selon leur cycle de vie et leurs besoins (recherche de financements, développement du numérique, mise en place de formations, création de zones d’activités économiques, mise à disposition de bâtiments).

À côté de ces réseaux locaux, on notera que l’IMT Mines Alès bénéficie de son appartenance au réseau national Institut Mines-Telecom (IMT). Elle organise depuis 2016 des week-ends d’accélération intitulés « TechTheFutur », durant lesquels des entrepreneurs sont accompagnés par des experts (consultants, enseignants-chercheurs, responsables des relations entreprises de l’IMT Grand Est ou d’Alès, etc.) et des élèves ingénieurs pour identifier des pistes concrètes d’innovation.

Un enclavement « relationnel » marqué à l’Ouest

L’appartenance d’Alès à la grande région Occitanie n’apparaît pas encore comme un atout, tant le rattachement est récent. Il n’existe pas ou peu de relations entre Alès et Toulouse, surtout dans les sujets du quotidien que ce soit sur l’emploi et l’attractivité économique selon Annick Le Lan. La Région recherche toutefois des synergies entre les territoires qui la composent, selon Jalil Benabdillah, ce qui n’a pas été fait jusqu’à maintenant. La mise en place d’une antenne à Montpellier du pôle de compétitivité Aerospace Valley, décidée en 2018, a notamment pour objectif de faire bénéficier la partie orientale de la région d’un effet d’entraînement de la filière aéronautique. À Alès, c’est la synergie avec la mécatronique qui est attendue. Pour Jalil Benabdillah, Alès et Albi pourraient se rapprocher en raison du partage d’une appartenance commune à l’IMT et de l’existence d’un pôle mécanique dans les deux villes. Toujours est-il que les deux villes se situent de part et d’autre du parc naturel des Grands Causses, ce qui rend impossible la liaison directe sans passer par le Bas Languedoc.

Le territoire d’Alès partage davantage de liens avec l’est du Gard et le Vaucluse. C’est en tout cas ce que suggère les emplacements respectifs du pôle formation de l’UIMM (à Laudun-l’Ardoise), du campus des métiers et des qualifications d’excellence « Process et technologie en milieu sensible » (dans le Gard rhodanien, autour de la filière nucléaire et de la filière chimie29) et celui du groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ) « Gard, Vallée et Delta du Rhône ». Ce dernier a été créé en 2008 pour répondre aux besoins de main-d’œuvre dans l’industrie et permet l’insertion des personnes éloignées de l’emploi dans un territoire marqué par un chômage et une pauvreté élevés. Basé à Bagnols-sur-Cèze, il comprend notamment NTN-SNR parmi ses membres.

Plusieurs acteurs ont également souligné l’existence de relations avec Marseille, notamment l’entreprise ErgoSanté qui mène des travaux de recherche avec l’université.

Enfin, les relations entre Nîmes et Alès concernent les questions de mobilité, de recherche et d’enseignement supérieur dans le cadre du Pôle métropolitain créé en 2012. Les deux villes ne partagent pas la même histoire industrielle, Nîmes n’est pas caractérisée par la présence de grosses industries mais elle montre néanmoins un certain dynamisme dans l’émergence de nouvelles activités industrielles, souvent innovantes.

Un écosystème en perpétuel renouvellement

Les acteurs cévenols se sont illustrés par leur créativité durant la crise sanitaire liée au Covid. Frédéric Burgals raconte ainsi comment son entreprise, spécialisée dans les matériaux pour bâtiment, est parvenue à concevoir des masques et à les produire pour la communauté locale.

« En 2020, le Covid nous a mis en difficulté, comme beaucoup d’entreprises. Nous avons refusé de mettre notre usine à l’arrêt et décidé de nous lancer dans la production de masques, ce qui n’avait rien d’évident pour une entreprise de notre secteur. Dans notre gamme de produits pour l’automobile,figurait un tissu filtrant qui s’est avéré correspondre aux normes établies par l’armée et, par ailleurs, nous disposions de machines permettant de découper des pochoirs décoratifs, que nous avons adaptés à la découpe des masques. Pour pallier le manque d’élastiques, nous avons utilisé du joint en silicone qui, une fois durci, devient très élastique, et nous l’avons fait tester sur le plan dermatologique. Une fois tous les tests réalisés, nous avons lancé la production et rapidement croulé sous les demandes. À nouveau, nous nous sommes tournés vers l’IMT, qui nous a prêté des robots permettant d’assembler rapidement les masques. Quand la demande est devenue trop importante, Alès Agglomération a mis à notre disposition un local supplémentaire. »

Autre exemple d’innovation née durant la crise sanitaire, le distributeur de gel hydroalcoolique avec pédale créé par Citynox, spécialiste de l’inox pour le mobilier urbain. Le distributeur est une adaptation des bornes urbaines que Citynox a l’habitude de fabriquer ; en deux mois et demi, l’entreprise en a produit 140 000.

Plus généralement, tous les territoires sont propices à l’émergence de nouveaux projets, qu’il s’agit de révéler et d’encourager. Les acteurs alésiens ont ainsi créé un concours en 2012, offrant des dotations financières ou un accompagnement, afin de signaler des projets à potentiel de croissance et d’attirer les porteurs de projets. Lancé initialement par Alès Agglomération, le concours Alès Audace réunit aujourd’hui Alès Myriapolis, l’IMT Mines Alès, la SAEM’Alès et Leader Alès. Sur les dix éditions30, 93 lauréats (dont environ 50 % d’activités industrielles) ont reçu 1 150 000 euros de dotations. Sur ces 93 projets, 82 % sont toujours actifs. Ils ont permis de créer 250 emplois sur le territoire.

Le concours Alès Audace, un outil de développement économique

Alès Agglomération a créé en 2010 un concours d’idées innovantes, Alès Audace. S’il était au départ un outil marketing, il est devenu aujourd’hui un outil de développement économique destiné à détecter des projets qui concourraient à l’emploi et à l’attractivité du territoire. Ces projets s’inscrivent dans tous les secteurs d’activité et dans le territoire. Les mécènes apportent des contributions financières (subventions ou prêts à taux zéro via le reliquat du fonds d’amorçage de l’ADIRA) ou en nature (hébergement, foncier, mise à disposition des laboratoires de recherche par exemple). Les candidats s’engagent à rester sur le territoire pendant cinq ans. Chaque année, entre 130 et 150 dossiers sont déposés. Une vingtaine de dossiers sont sélectionnés pour un oral. À côté du concours général, les organisateurs remettent un prix spécifique ; parmi les plus récents, citons le prix « je quitte Paris » et le prix « culture », en lien respectivement avec la crise sanitaire et la candidature d’Alès au titre de capitale française de la culture. Les lauréats bénéficient d’un accompagnement d’un an par l’agence de développement et d’un parrainage par un membre du réseau Leader Alès. Les projets non lauréats sont réorientés vers d’autres institutions.

La culture au service du développement local de l’industrie

De manière générale, le déploiement d’événements et d’équipements culturels participe à l’amélioration de la qualité de vie locale, à l’image de marque du territoire, et à la création d’emplois et de revenus (OCDE, 2005). La culture devient alors non seulement un levier d’attractivité de personnes extérieures au territoire mais aussi un nouveau produit à exporter et un vecteur de reconstitution d’un capital social. En particulier, elle peut participer au changement d’image du bassin alésien qui souffre toujours du poids de son histoire autour des mines et de leur fermeture.

Pilier du projet de territoire d’Alès Agglomération, la culture fait partie depuis longtemps de l’écosystème alésien. La ville d’Alès a d’ailleurs candidaté pour être capitale française de la culture en 2024 mais s’est fait devancer par une autre ville de tradition industrielle, Montbéliard.

En particulier, le territoire a un lien particulier avec les activités du cirque depuis la création par le cirque Archaos de l’école de cirque du Salto, dans la seconde moitié des années 1980, à la verrerie de Rochebelle alors en friche. Depuis, La Verrerie a été rachetée en 1996 par la ville d’Alès et accueille aujourd’hui le Pôle culturel et scientifique ainsi que le Pôle national Cirque Occitanie, l’un des 14 pôles labellisés « pôle national du cirque » en France. Il accueille des compagnies en résidence de création, et propose des spectacles ainsi que des ateliers découverte pour les enfants et les adolescents. Des festivals autour du cirque sont également organisés, inCIRCus et Temps de Cirques, respectivement en juin et à l’automne.

Alès est aussi dotée d’un lieu labellisé « Scène nationale »31, le théâtre Le Cratère, qui accueille des spectacles de théâtre, danse, musique, cirque et arts de la rue. Pour l’instant, le public est avant tout départemental, son effet sur le développement exogène du territoire est donc limité.

Une réflexion est en cours sur le potentiel de développement de la filière des industries culturelles et créatives (ICC) dans le territoire, et sur les passerelles à établir entre cette filière et l’industrie32. D’une part en effet, les décors de spectacles comportent des éléments métalliques et mécaniques. D’autre part, on observe un usage croissant des technologies dans les spectacles. Cette réflexion est liée à la présence sur le territoire de l’entreprise S Group, fondée en 2001 et dirigée par Alexandre Coulet, qui fournit des solutions audiovisuelles, techniques et scénographiques (sonorisation, lumière, vidéo, structure scénique, distribution électrique) et des décors pour la télévision, les festivals, les tournées d’artistes et les événements (sport, conférences, etc.).

  • 27 ‒ La plupart des entreprises sont alésiennes.
  • 28 ‒ Cette stratégie de développement local a déjà été mise en avant par Tallec (2012).
  • 29 ‒ Ces deux filières sont caractérisées par des risques élevés à la fois pour l’homme et pour l’environnement qu’il convient de maîtriser. Parmi les formations concourant à l’innovation dans ces filières, il y a la chaudronnerie, la chimie, l’usinage.
  • 30 ‒ Il n’y a pas eu d’édition en 2020 en raison de la crise sanitaire.
  • 31 ‒ Lieu de production et de diffusion de la création contemporaine dans le domaine du spectacle vivant.
  • 32 ‒ Ce rapprochement entre industrie manufacturière et industrie créative avait également été mis en avant dans le cas du Territoire d’industrie Angoulême-Cognac que tout oppose sur le papier (Fouqueray et Nadaud, 2021).

Conclusion

Grâce à la mobilisation des élus, des acteurs privés et des organismes de formation et d’insertion, le bassin d’Alès est aujourd’hui porté par une dynamique industrielle autour de quelques filiales de grands groupes et d’une majorité de PME, spécialisés dans plusieurs filières dont la mécanique et l’agroalimentaire. Les entreprises y investissent et prévoient de continuer à le faire, selon les premiers échanges autour du dispositif Rebond industriel. Malgré la persistance de la précarité, les acteurs affichent leur volonté de poursuivre leurs efforts en faveur d’une reconversion réussie. La baisse du taux de chômage lors des vingt dernières années en est un premier pas. Voici les principales leçons que l’on peut tirer de cette étude de cas.

Tout d’abord, si la reconversion industrielle d’un territoire est possible quand des acteurs se mobilisent pour atteindre cet objectif, la difficulté réside principalement dans la pérennisation de ses effets. Alès a ainsi connu plusieurs vagues de reconversion, plus ou moins fragiles.

Cette pérennisation est rendue compliquée par le caractère multi-dimensionnel de la reconversion industrielle d’un territoire. Ce dernier doit en effet se relever d’un dommage non seulement économique mais aussi social, démographique et parfois politique. Une reconversion suppose donc de réanimer l’écosystème dans sa totalité : la formation des compétences, les ressources foncières, les réseaux d’entreprises. On notera au passage qu’on parle bien de réanimation (ou de réinvention) et non de création ex nihilo d’un écosystème au service de l’industrie.

Pour ce faire, l’intervention de la puissance publique semble inévitable pour donner une impulsion première, puis accompagner durablement la reconversion. Encore faut-il que les pouvoirs publics locaux saisissent la balle au bond. L’équipe municipale et l’agglomération d’Alès y sont parvenues et ont pris le relais du programme de reconversion mis en œuvre par les gouvernements successifs entre les années 1970 et les années 2000.

Le bassin alésien doit aujourd’hui faire face à plusieurs enjeux : la transition écologique, le foncier, les compétences.

Le virage de la durabilité

Des entreprises du territoire ont déjà entamé un tournant vers des activités plus respectueuses de l’environnement. Parmi les entreprises lauréates du concours Alès Audace33, citons ErgoSanté, implantée à Anduze. Créée en janvier 2013, elle distribuait d’abord des sièges ergonomiques puis a commencé à les produire en 2015. En 2016, elle a conçu un exosquelette pour aider les manutentionnaires dans le cadre d’un partenariat avec la SNCF. Ces deux activités de production ont été lancées tout en favorisant l’emploi de personnes en situation de handicap. Aujourd’hui, ErgoSanté a le statut d’entreprise adaptée.

Après le Brexit en 2020 et le blocage du canal de Suez en 2021, ErgoSanté décide de modifier ses sources d’approvisionnement : elle relocalise ses sites de production dans les Cévennes et s’y approvisionne également. Elle décide aussi de mettre en œuvre un modèle circulaire et de remettre sur le marché des sièges usagés. Si l’idée avait déjà germé dans la tête du dirigeant Samuel Corgne en 2015, elle ne s’était pas concrétisée, faute de demande à cette époque.

Le dirigeant et fondateur résume son modèle par les trois principes suivants : « tech, inclusion, rentabilité ». Le développement de l’entreprise est tel qu’elle comprend aujourd’hui plus de 100 salariés et qu’elle poursuit son extension. Elle a notamment construit un nouveau bâtiment, financé en partie par l’appel à projets de France Relance « Soutien aux projets industriels dans les territoires ».

Plus généralement, les employeurs les plus importants du territoire s’investissent dans la transition écologique de leur activité et de leur territoire. Le pôle « industrie et innovation » des transports Capelle, qui rassemble un atelier de chaudronnerie et un bureau d’études, a ainsi le projet d’équiper ses bâtiments en panneaux photovoltaïques. L’entreprise est équipée d’un atelier de reconstruction de matériels de transport (remorques par exemple). Un magasin de pièces de rechange y est également implanté pour répondre aux besoins des différentes agences de l’entreprise.

Comme le rappelle le directeur du Pôle mécanique, Jérémy Marin-Cudraz, celui-ci est tourné depuis ses débuts vers la mobilité durable. Cette orientation semble s’être accélérée dans les années 2010, avec l’organisation des Rencontres internationales des véhicules écologiques (tous les deux ans, en alternance avec le Mondial de l’automobile de Paris). Ces rencontres ont fourni à des élèves-ingénieurs de l’école des Mines l’occasion de présenter, en 2011 puis en 2016, des prototypes d’une voiture équipée d’un moteur fonctionnant au biodiesel issu d’algues.

Senfas souhaite proposer à Alès Agglomération les eaux de refroidissement et de lavage (aussi appelées eaux grises) issues de son process de production (et filtrées) pour arroser les plantes du territoire.

Les métiers liés à la transition énergétique et écologique font par ailleurs l’objet de formations. L’école des Mines a ainsi créé un parcours de formation « environnement, énergie et risques », permettant d’aborder un vaste domaine : des risques naturels à l’implantation d’une unité industrielle sur un territoire, en passant par la réglementation ICPE et la connaissance de la biodiversité, l’économie circulaire, la valorisation des déchets, la gestion de la qualité de l’air et le stockage de l’énergie. Le lycée Jean-Baptiste Dumas propose quant à lui une seconde professionnelle sur les métiers des transitions numérique et énergétique.

L’agglomération est elle-même impliquée dans la transition. Son projet de territoire comprend un axe dédié à la transition écologique, qui prévoit une série d’actions : plan alimentaire territorial, transition énergétique, économies d’énergie, développement des transports en commun, amélioration du tri des déchets, plan climat. Elle avait déjà engagé une démarche dès 2007, avec la création de la Mission développement durable. L’Occitanie a par ailleurs le projet de devenir une « région à énergie positive », c’est-à-dire de produire plus d’énergie qu’elle n’en consomme.

L’enjeu du foncier

Selon Annick Le Lan, l’agglomération dispose seulement de 4 hectares de foncier disponible dans les zones d’activité économique en 2022. La même année, elle a reçu des demandes correspondant à 17 hectares. Comme mentionné précédemment, les friches laissées par les industriels qui ont quitté le territoire ont déjà été réhabilitées et réutilisées par d’autres entreprises industrielles ou par des activités de services. Selon l’outil Cartofriches du Cerema, il demeure une poignée de friches, qu’il faut dépolluer, comme celui d’une ancienne centrale à charbon et d’une usine de pulvérisation de charbon à la Grand-Combe, ou les anciennes mines de Carnoules à côté de Saint-Sébastien-d’Aigrefeuille, où l’on extrayait du plomb argentifère.

Or, l’objectif de zéro artificialisation nette des sols en 205034, imposé par la loi Climat et résilience de 2021, vient accentuer cette rareté du foncier, dans un contexte également caractérisé par l’accroissement de la population. Pour Alès, la réalisation de cet objectif suppose de concilier l’accueil d’habitants supplémentaires et celui d’activités économiques, alors que les stocks de sols susceptibles de le permettre se réduisent d’année en année (entre 2021 et 2050, il faut réduire de 50 % le rythme de consommation des sols). Alès Myriapolis a mis en place une « bourse aux locaux industriels » (recensement des bâtiments de plus de 1000 m2 disponibles à la vente ou à la location) et à l’identification des besoins en foncier.

Le pari de la régénération des compétences

Comme sur d’autres territoires industriels, le succès de la reconversion est dépendant de la capacité du bassin à régénérer ses compétences. Des tensions sont actuellement observées sur le marché local du travail. Du côté de la demande d’emploi, le bassin alésien est caractérisé par un niveau de chômage élevé, une forte proportion de personnes détenant un diplôme de niveau brevet ou moins et de personnes à qualification ouvrière. Du côté de l’offre d’emploi, les entreprises industrielles éprouvent des difficultés croissantes de recrutement (Figure II) ; les recrutements recensés comme les plus difficiles sur le territoire d’industrie au cours de la période 2017-2020 concernent les ouvriers des secteurs de l’industrie (qualifiés ou non qualifiés selon les années) ainsi que les autres techniciens et employés.35

Figure II – La situation du recrutement en 2014 et 2022 dans les secteurs de l’industrie, des services aux entreprises et des services aux personnes

Source : Enquête BMO, Pôle emploi.

Il existe donc un problème d’appariement sur le marché local de l’emploi, dont les acteurs d’Alès Myriapolis ont bien conscience. Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer.

Le premier est l’absence de mobilité géographique des travailleurs. Les dispositifs visant à améliorer la mobilité sont souvent évoqués pour favoriser un meilleur appariement entre offreurs et demandeurs d’emploi. Mais la question de la mobilité se pose différemment entre les personnes selon leur CSP, leur origine sociale, leur territoire de résidence. C’est pourquoi les personnes en charge de l’emploi et de l’insertion comme Alexia Melloul, chargée de mission à la mission locale jeunes Alès-Cévennes, parle de « motilité », qui représente le désir de mobilité, et qui dépend du capital économique, social et culturel des personnes36. Face à un même réseau de transport, deux personnes différentes voient en effet des possibilités de déplacement différentes.

Sur le bassin alésien, on observe un attachement des habitants à leur territoire, qui les empêche d’être mobiles professionnellement. Lorsque Crouzet s’est déplacé à Valence, seule une poignée de travailleurs sur les 70 que comptait l’usine ont déménagé. Cet ancrage est renforcé dans le cas des personnes moins qualifiées, qui subissent plus fortement que les autres une perte de capital social et de ressources de proximité s’ils déménagent (Fol, 2009). Pour les moins qualifiés, le marché du travail est donc local. Pour Christophe Abella, directeur Emploi-Formation de l’UIMM Occitanie, un levier serait alors de travailler sur la mobilité de proximité. Pour d’autres comme Arnoult et Duhautois (2019), les entreprises doivent s’implanter là où il y a la population. De ce point de vue, la stratégie de territoire doit aller vers des actions en faveur de l’attractivité du territoire. Les deux leviers sont complémentaires, l’amélioration de la mobilité de proximité est un atout pour attirer des entreprises dans un territoire. À l’inverse, la mobilité moins contrainte qui caractérise les plus qualifiés entraîne des comportements arbitragistes et créé des tensions sur les recrutements.

Un point important à soulever est que, de manière contre-intuitive, les jeunes ne semblent pas former la catégorie la plus mobile du territoire. Cela nous amène au deuxième frein au renouvellement des compétences, à savoir la faible attractivité des formations aux métiers de l’industrie à l’égard des jeunes. Les acteurs de la formation remarquent que c’est sur les CAP-Bac professionnel qu’il est le plus difficile de les attirer. Si leurs attentes vis-à-vis du travail ont peut-être évolué, il faut aussi se poser la question des relations des jeunes aux formations. Pour Christophe Abella, celle-ci doit être repensée comme un « parcours » qui s’effectue en plusieurs temps et qui nécessite différents leviers d’action : un film n’est pas suffisant pour inciter des jeunes à rejoindre des formations et surtout un métier. Dans le cas de jeunes en décrochage scolaire ou en situation de précarité, il faut même prévoir un accompagnement social pour répondre aux besoins en matière de mobilité, etc. Surtout, il ne faut plus voir la formation professionnelle comme une « sortie de secours » selon Christophe Abella.

D’autres facteurs comme l’attractivité des grandes villes voisines peuvent aussi expliquer que certains jeunes partent du territoire et n’y reviennent pas. C’est le cas des jeunes de Figeac qui partent sur Toulouse, ceux d’Alès privilégiant Montpellier et Avignon.

À ces problématiques s’ajoute leur méconnaissance de l’industrie. Quand l’usine SNR a ouvert ses portes aux jeunes de la mission locale d’Alès, ceux-ci ont découvert que « les chaînes de production étaient automatisées » ! Plus généralement, le travail dans l’industrie est toujours perçu comme synonyme de déclassement social et le bassin alésien souffre toujours de l’image de « territoire sinistré ».

Plusieurs institutions locales, comme la mission locale jeunes Alès-Pays de Cévennes ou le Pôle formation de l’UIMM Gard-Lozère, proposent, parfois en partenariat, de nouvelles méthodes pour attirer les jeunes vers la formation aux métiers industriels : ateliers découverte, escape game, casques de réalité virtuelle pour découvrir les métiers, classes d’entreprises, etc.

L’école de la seconde chance d’Alès-La Grand-Combe et l’établissement pour l’insertion dans l’emploi (EPIDE) nouvellement installé dans le territoire permettent quant à eux un accompagnement dédié aux jeunes éloignés de l’emploi. L’enjeu d’assurer une formation minimum aux jeunes est primordial pour assurer leur employabilité dans les entreprises du territoire. Nous noterons que plusieurs entreprises interrogées nous ont précisé que le diplôme n’était pas forcément déterminant pour l’embauche : ce qui compte est leur potentiel, leur adaptabilité, leurs qualités humaines. La formation initiale doit aider à fournir ce socle.

Les enjeux auxquels fait face le bassin alésien sont ainsi de taille mais ses acteurs se sont déjà mis au travail.

  • 33‒Par deux fois : dans la catégorie «jeune entrepreneur» en 2016 et la catégorie « entreprise de l’année » en 2019.
  • 34 ‒ Le solde entre les sols artificialisés et les sols renaturés (ou désartificialisés) sur un périmètre et une période donnés devra être égal à zéro.
  • 35‒En 2017 : techniciens en électricité et en électronique, ouvriers non qualifiés métallerie/serrurerie, montage, ouvriers qualifiés de la maintenance en mécanique, techniciens experts, mécaniciens et électroniciens de véhicules. En 2020 : mécaniciens et électroniciens de véhicules, autres ouvriers non qualifiés de type industriel, ouvriers non qualifiés métallerie, serrurerie, montage, pilotes d’installation lourde des industries de transformation, chaudronniers, tôliers, traceurs, serruriers, métalliers, forgerons. Source : données Enquête BMO, Pôle emploi, obtenues à partir de Dataviz Territoires d’industrie.
  • 36 ‒ Définition donnée par le site Géoconfluences.

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Barrère, F. (2015). Liquidation de Richard Ducros à Alès : Fayat condamné à payer 12 millions d’euros. Midi libre. https://www.midilibre.fr/2015/09/29/liquidation-de-richard-ducros-a-ales-fayat-condamne-a-payer-12-meur,1219574.php

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Annexe- Liste des personnes interrogées

  • Abella Christophe, directeur Emploi-Formation de l’UIMM Occitanie
  • Benabdillah Jalil, vice-président de la région Occitanie en charge de l’économie, l’emploi, l’innovation, la réindustrialisation
  • Brachet Marc, chef de projet Industrie-Innovation à l’agence Alès Myriapolis
  • Corgne Samuel, dirigeant d’ErgoSsanté
  • Cornille Julien, secrétaire général de l’UIMM Gard-Lozère
  • Le Lan Annick, directrice d’Alès Myriapolis et directrice adjointe au développement économique à Alès Agglomération
  • Marin-Cudraz Jérémy, directeur du Pôle mécanique
  • Melloul Alexia, chargée de mission à la mission locale jeunes Alès-Cévennes
  • D’Ozenay Michel, dirigeant de Senfas
  • Rampon Jean, sous-préfet d’Alès
  • Russier Jonathan, gérant de Citynox
  • Thiery Gwenaëlle, responsable communication et des relations institutionnelles d’ErgoSanté

Caroline Granier, Le bassin industriel d’Alès, une histoire de reconversions, Les Docs de La Fabrique, Paris, Presses des Mines, 2023.
ISBN : 978-2-38542-396-4
© Presses des MINES – TRANSVALOR, 2023
60, boulevard Saint-Michel – 75272 Paris Cedex 06 – France presses@mines-paristech.fr
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