La Saison des pactes
Les veilles d’élections nationales voient fleurir les « pactes », modalités d’un « contrat » entre le futur décideur et ses électeurs. C’est une des nouvelles formes de la communication politique, surtout lorsqu’il s’agit de faire admettre des réformes réputées impopulaires. Plusieurs groupes de réflexion et associations professionnelles présentent leurs recommandations économiques et sociales sous la forme du pacte, destinés à la fois à la promotion des think-tanks qui les rédigent et des personnalités qui s’en saisissent. La guerre de l’influence est lancée.
En 2006, les principaux candidats à l’élection présidentielle avaient signé en grande pompe le pacte écologique de la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme. Ce paraphe leur permettaient de bénéficier de l’image écologique de la fondation. Qu’en reste-t-il six ans plus tard ?
En amont de la présidentielle de 2012, la pièce pourrait se rejouer sur le terrain économique et social. Ces derniers mois, ont été proposés :
– « Le Pacte de compétitivité industrielle » de COE-Rexecode, 5 mesures urgentes basées sur le rapport traitant de la divergence de compétitivité entre la France et l’Allemagne rendu à Éric Besson le 20 janvier 2011.
– Le rapport de l’Institut Montaigne de juin 2011 sur la croissance des PME ; un pacte de 11 propositions qui défendent l’investissement direct de l’épargne des Français dans les PME/ETI via des incitations fiscales.
– « Le nouveau Pacte pour l’industrie et pour la croissance et pour l’emploi » du Groupe des fédérations industrielles, d’octobre 2011. Il propose notamment le remplacement des cotisations patronales servant à financer la branche « famille » par la fiscalité (TVA et CSG) ; la création d’un Crédit impôt innovation pour les PME et les ETI ; l’investissement d’une partie de l’épargne des Français directement vers ces entreprises ; et la promotion de l’apprentissage et de la formation en alternance.
– « Le Pacte fiscal et social pour la compétitivité de la France » du Medef, présenté le 15 novembre 2011 et adressé à tous les candidats à l’élection présidentielle de 2012. Son principe directeur consiste en la baisse des charges patronales et salariales compensée par la hausse combinée de la TVA et de la CSG.
– « Le Livre blanc 2012 des entreprises innovantes » est le pacte de 10 propositions du Comité Richelieu pour favoriser la croissance des PME innovantes. Il propose notamment un nouveau statut des entreprises innovantes ; la création d’un Crédit impôt recherche et innovation ; et l’adhésion systématiques des grands comptes publics au « Pacte PME ».
– Ce « Pacte PME » a fait lui-même l’objet d’une concrétisation en juin 2010, sous la forme d’une association mise en place avec le soutien d’Oséo, de la DGA et de la DGCIS. Dans son acception d’origine, le pacte PME engage les grands comptes signataires à publier régulièrement la part représentée par les PME parmi leurs fournisseurs. L’association éponyme se positionne plus largement comme une plateforme d’interaction et de réflexion, visant à améliorer la qualité des relations entre PME et grands comptes, privés et publics.
Sont annoncées prochainement les conclusions et recommandations de la Conférence nationale de l’industrie, ainsi que celles de l’UIMM dans le domaine du dialogue social et de la formation. Affaire à suivre donc.
Cette profusion de pactes et leurs propositions sont scrutées par décideurs et candidats. Les propositions les plus récurrentes sont légitimement regardées de près et, si approuvées, permettent de fournir la substance de certaines annonces. C’est ainsi que l’on peut retrouver dans les différents pactes l’inspiration d’une des mesures annoncées par Nicolas Sarkozy lors de son intervention télévisée du 29 janvier 2012 : le transfert du coût du travail (charges patronales familiales) sur la fiscalité (TVA et CSG).
La multiplication des pactes et les indices de convergence permettent de dégager les mesures les plus consensuelles du moment et participent d’une stratégie d’influence concertée, mais non « organisée ». On peut s’interroger sur la mise en place effective des propositions qui seront endossées par les différents candidats, une fois les effets d’annonce passés.
La saison des pactes est-elle condamnée à être suivie par la saison des désillusions ?