Le jeu vidéo, une industrie stratégique

C’est ce qu’affirme le président du syndicat national du jeu vidéo. Le syndicat propose ainsi 10 mesures clés pour éviter que cette industrie ne continue à s’affaiblir en France.

Le jeu vidéo est incontestablement une industrie d’avenir. Son marché (logiciel et matériel) pèse et 52 milliards de dollars. Il croît régulièrement à un rythme supérieur à 10% l’an. En 2016 son chiffre d’affaire devrait dépasser 90 milliards, soit davantage que l’industrie cinématographique.
Dans ce domaine, la situation de l’industrie française est pour le moins contrastée. Elle est très bien placée avec le n°1 mondial Vivendi (grâce au rachat de sociétés américaines) ou Ubisoft, entreprise née en France cette fois, qui se situe dans le top 5 mondial. Elle compte plus de 200 petites entreprises performantes dans tous les domaines du jeu. Sur certains nouveaux secteurs porteurs comme les jeux sur réseaux sociaux, la France est même le second producteur mondial.

Mais, simultanément, la production nationale est dans un état inquiétant. Depuis 10 ans, elle a perdu la moitié de ses emplois (de 10 000 à 5000). Elle est passée de la cinquième place mondiale à la septième. Et si elle brille sur des créneaux nouveaux et en forte croissance comme les jeux sociaux et les jeux sur téléphone mobile, elle vu le gros du marché, les jeux sur console, lui échapper partiellement.

A qui la faute ? A la concurrence féroce qui suscite cette industrie extrêmement porteuse. Et d’abord à celle du Canada et de Québec en particulier qui a choisi de faire du jeu un axe de développement stratégique. Il a fait des ponts d’or aux entreprises, allant jusqu’à financer 50% des coûts de production de leur jeux ! Résultat, en 10 ans le nombre de développeurs dans ce pays a connu une explosion fulgurante : il est passé de 500 à… 15000 ! Ubisoft y compte ainsi plus de 5000 développeurs contre 1200 seulement en France. Autrement dit, la délocalisation – vers un pays à hauts salaires…- bat son plein !

La concurrence ne risque pas de faiblir. Nicolas Gaume, président du Syndicat national du jeu vidéo (SNJV) souligne qu’aujourd’hui, l’Australie, la Corée, la Chine, les Etats-Unis et même Abu Dhabi s’efforcent à leur tour d’attirer les entreprises sur leur territoire.

C’est dans ce contexte que le SNJV vient de présenter ses « 10 mesures clés pour relever les défis du jeu vidéo en France », destiné à sensibiliser les candidats à l’élection présidentielle. « Le caractère stratégique de cette industrie n’est pas pris en compte dans la politique économique de la France » affirme-t-il.

Regroupées selon cinq grands thèmes, ces propositions s’appuient sur un socle commun : elles sont toutes liées à la grande spécificité du métier. Le secteur est en particulier constitué de très nombreuses PME et TPE, exige des investissements très lourds et, de plus, risqués. Surtout, il fait à la fois partie des industries culturelles et numériques. Du coup : « Nous n’avons notre place nulle part car pour les uns nous sommes trop liés numériques pour les intéresser et pour les autres trop impliqués dans le culturel » déplore Nicolas Gaume.

Il ajoute que, en outre, côté financement, les organismes traditionnels tels que la Caisse des Dépôts « sont très mal équipés pour gérer les investissements immatériels et offrir la réactivité qu’exige cette industrie en perpétuelle et rapide évolution. »

Le détail des propositions est accessible via le lien dans la rubrique En Savoir +. On en soulignera ici trois.

La première concerne la création d’un fonds d’avances participatives doté de 100 millions d’euros qui selon le SNJV « permettrait d’accompagner la croissance de plus d’une centaine d’entreprises du jeu vidéo » qui sont essentiellement des TPE ou PME.

La deuxième porte sur le financement de la production avec la suggestion de créer pour le jeu vidéo l’équivalent des Sofica dédiées à l’industrie cinématographique et audiovisuelle.

La troisième, urgente, est une simple mesure de bon sens : le rétablissement du crédit d’impôt qui, de 2008 à fin 2011 a permis de financer jusqu’à 20% la production d’un jeu vidéo. La mesure voit son renouvellement bloqué par Bruxelles, au nom de la concurrence européenne. Mais là au moins Nicolas Gaume a bon espoir : « Nous sommes confiants car les autres pays européens, en particulier le Royaume-Uni et l’Allemagne, nous soutiennent » dit-il. Le premier, qui excelle dans les jeux pour console, et le second, bien placé sur les jeux en ligne, ont en effet la volonté d’instaurer à leur tour une aide de ce type à leur industrie.

Franck Barnu

Après des études de physique, Franck Barnu s’est dirigée vers la presse industrielle et technologique. Comme journaliste, il a en particulier suivi le domaine des technologies...

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