Crise énergétique en Europe et protectionnisme américain – La réindustrialisation compromise ?

Grâce à des entretiens réalisés avec des industriels de toutes les filières concernées, cet ouvrage vient corroborer les premiers résultats publiés en avril : la hausse des prix de l’énergie et la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) font peser une menace sur près de 6 % de l’emploi industriel français.

Dans la continuité du Working Paper “Emplois industriels menacés par la crise énergétique, le MACF et l’IRA : une estimation” publié en avril 2023 en collaboration avec le cabinet Oliver Wyman, cette Note apporte des compléments d’analyse et affine les résultats d’estimation du volume d’emplois industriels menacés par trois facteurs : le maintien à des prix durablement élevés de l’énergie, la mise en place prochaine du MACF (et la suppression afférente des quotas gratuits d’émissions de CO2) et l’instauration d’aides aux entreprises attractives aux États-Unis dans le cadre de l’Inflation Reduction Act (IRA).

Ce travail d’estimation est réalisé dans le cadre d’hypothèses qui s’énoncent simplement : doublement du prix de l’électricité et du gaz par rapport à leurs niveaux de 2019 et introduction immédiate du MACF avec un prix de la tonne de CO2 à 100 euros. Une série d’entretiens avec des représentants des principales filières industrielles concernées vient compléter le travail, qu’elle éclaire de nombreux retours du terrain.

Ainsi, cette Note montre que l’élévation durable des prix de l’énergie constitue de loin la première menace pour notre industrie. Par rapport à une année de référence (2019), un doublement des prix de l’électricité et du gaz met en danger jusqu’à 116 000 emplois industriels en France. C’est quatre fois plus que le poids exercé parallèlement par la disparition des quotas gratuits à la suite de l’introduction du MACF (près de 28 000 emplois supplémentaires menacés). De son côté, l’IRA vient rendre ces deux menaces plus tangibles encore pour quelques secteurs très carbonés, mais elle n’est pas de nature à ajouter un risque supplémentaire. Ce premier résultat est confirmé dans une très large mesure par les entretiens que nous avons eus avec les filières industrielles.

Ce travail permet en outre de cerner l’ampleur respective des risques qui pèsent aujourd’hui sur les différents secteurs industriels français, dont tout le monde s’accorde à souligner le rôle indispensable dans le rétablissement d’une souveraineté économique, et dont il est certain qu’ils sont grandement fragilisés. Plus précisément, cette étude révèle que la métallurgie est aujourd’hui l’industrie la plus impactée en France. Un doublement des prix de l’électricité et du gaz couplé à l’introduction immédiate du MACF menacerait près de 27 % des emplois de ce secteur (soit 18 000 emplois). Parmi tous les secteurs industriels étudiés, il s’agit de loin de l’exposition la plus aiguë aux risques étudiés, ce secteur étant suivi par l’industrie du papier carton (20 % des emplois menacés) et par l’industrie chimique (15 % des emplois du secteur menacés).

#3questionsà Ahmed Diop et David Lolo, coauteurs de l’étude :

 

Note45_Crise énergétique en Europe et protectionnisme américain
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